126 partages |
Le Conseil d'État vient de se prononcer sur la problématique des rendez-vous en ligne par une décision du 10 juin 2020 (Conseil d'État, 7 et 2e Ch. Réunies, 10 juin 2020, n°435594). Il convient de rappeler que la quasi-totalité des préfectures impose aujourd'hui aux ressortissants étrangers de prendre un rendez-vous en ligne sur un site internet spécialement dédié, afin de déposer leur dossier de demande ou de renouvellement de titre de séjour. Si la mise en place de ces plateformes de prise de RDV répondait à la volonté d'une meilleure prise en charge des usagers, elle est très rapidement devenue une source importante de difficultés. Des usagers sont contraints de multiplier des connexions sur la plateforme pendant des semaines, des mois et même années pour espérer obtenir un RDV. Le message généré par la plateforme est presque toujours identique " Il n'existe plus de plage horaire libre pour votre demande de rendez-vous. Veuillez recommencer ultérieurement ".
En l'espèce, un ressortissant tunisien avait saisi le juge des référés du Tribunal administratif de Montreuil afin que ce dernier ordonne à la Préfecture de la Seine-Saint-Denis de lui fixer un RDV de demande de titre de séjour. Sa demande avait été rejetée. Un pourvoi avait alors été formé devant le Conseil d'État. L'affaire donne l'occasion au Conseil d'État de fixer les conditions dans lesquelles le juge des référés peut enjoindre au Préfet de fixer un RDV à l'étranger.
Pour que le juge ordonne la communication d'une date de RDV à l'usager, deux conditions doivent être satisfaites :
· L'étranger doit apporter la preuve qu'il n'a pas pu obtenir de rendez-vous par internet. Il peut notamment le faire grâce aux captures d'écran. Ces dernières ne seront cependant efficaces que si elles comportent les dates et heures des connexions infructueuses. Une simple prise de photo de son écran ne sera donc pas satisfaisante.
· L'étranger doit apporter la preuve qu'il a réalisé plusieurs tentatives sur plus d'une semaine. Des tentatives de connexion sur une seule semaine ne suffiront pas. Les tentatives infructueuses de prise de RDV en ligne doivent s'étendre sur plus d'une semaine. Une moyenne de trois semaines à un mois apparait raisonnable.
Cette double preuve apportée, le juge peut ordonner au Préfet de communiquer à l'étranger une date de RDV. Le juge fixe le délai dans lequel la Préfecture doit communiquer à l'étranger une date de RDV. Lorsqu'il y a urgence, le juge peut lui même fixer un délai maximal dans lequel le RDV doit avoir lieu.
Les étrangers ont donc désormais une voie de recours face à l'inaccessibilité des plateformes de prise de RDV. Le juge des référés peut être saisi et une décision obtenue en quelques jours. Bien que non obligatoire, le recours à un Avocat peut être d'une grande utilité, la procédure de référé étant par ailleurs soumise au respect des conditions spécifiques à ce type de recours, notamment la condition de l'urgence qu'il faudrait caractériser.
La présente décision du Conseil d'État n'est pas surprenante. On se rappelle que plusieurs organisations telles que La CIMADE, la Ligue des droits de l'homme, le GISTI et le syndicat des avocats de France avaient déjà attaqué devant le Conseil d'État le décret n°2016/685 du 27 mai 2016 qui autorise les services de l'État et les établissements publics administratifs à mettre en oeuvre des télé services permettant de saisir l'administration par voie électronique. Le Conseil d'État avait alors retenu, dans une décision du 27 novembre 2019, que le décret en cause n'a pas pour objet et ne saurait avoir légalement pour effet de rendre obligatoire la saisine de l'administration par voie électronique (Conseil d'État, 10e-9eCh. Réunies, 27 novembre 2019, n°422516). Autrement dit, faisait déjà remarquer le Conseil d'État, le décret crée simplement pour les usagers un droit et non une obligation, de prendre RDV en ligne. Dès lors, en cas de tentatives infructueuses sur internet, l'usager peut saisir la Préfecture pour solliciter la fixation d'un RDV. Il est indiqué dans ce cas, de justifier de ses démarches vaines sur internet, notamment à travers des captures d'écran. La saisine de la Préfecture peut se faire par courrier recommandé avec accusé de réception, ce qui permettra, en cas de non-réponse de la Préfecture ou de refus de RDV, de justifier de ses démarches dans le cadre d'un recours contentieux.
Une question en Nos avocats vous répondent gratuitement | 83%de réponse |
* Durant les 60 dernièrs jours
Offre et délai minimum transmis par un avocat sur Alexia.fr au cours des 30 derniers jours dans au moins une région.