Le Droit : la vente à réméré, une opération juridique hybride entre une vente immobilière et une opération de financement
La vente à réméré est régie par des dispositions légales spécifiques du Code civil. Ces dispositions visant à définir et à encadrer l'opération de vente pour protéger chaque partie impliquée.
Voici les principaux éléments du cadre juridique de la vente à réméré :
- Un acte authentique : la vente à réméré est obligatoirement réalisée par acte authentique signée devant un Notaire. Elle réunit un propriétaire, le vendeur, et un acquéreur, qui va financer l'opération.
Ce contrat doit mentionner clairement les conditions de son exécution, telles que la durée du réméré et les modalités de reprise du bien au terme de cette durée.
- Le délai de réméré : correspondant à la période durant laquelle le vendeur conserve la faculté de lever l'option aux fins de reprise de son bien immobilier. La durée légale maximum du réméré est de 5 ans. En pratique, cette durée varie entre 18 mois et 3 ans. Les parties fixent librement la durée du réméré durant les négociations qui précèdent la signature de l'acte de vente.
- La "faculté de rachat" : est un abus de langage. Il est juridiquement faux de parler de "rachat". En effet, en cas de "rachat", l'administration fiscale serait en droit de réclamer de nouveaux droits de mutation. Pour éviter cet écueil, la "faculté de rachat" consiste en réalité en une option qui provoque l'annulation de la vente à réméré. Pour pouvoir exercer cette option, le vendeur doit payer le prix de "rachat" fixé au moment de la signature du contrat de vente. Parallèlement, l'acquéreur doit garantir la restitution du bien au vendeur si ce dernier exerce son option conformément aux conditions convenues.
Vos droits : la vente à réméré, source de clauses abusives et de nullité
La vente à réméré est strictement encadrée par le Code civil en raison de sa complexité et des atteintes au droit du propriétaire qu'elle peut générer.
Voici une liste de points de vigilance à toujours garder en tête :
- Le droit de propriété est perdu : dès lors que l'acte de vente à réméré est signé, le vendeur perd la propriété de son bien. Il devient la propriété exclusive de l'acquéreur qui a financé l'opération.
- Le prix de vente ne doit pas être anormalement bas : certes, la vente à réméré, parce qu'elle constitue une opération risquée pour l'acquéreur qui peut perdre le bien à terme, induit un prix de vente inférieur à la valeur de marché. Toutefois, le prix de vente ne doit pas être lésionnaire. Autrement dit, le vendeur ne doit pas être lésé à hauteur de 7/12e du prix de vente. En moyenne, le prix de vente à réméré équivaut à 65 % de la valeur de marché.
- L'indemnité d'occupation doit être raisonnable : le vendeur bénéficie souvent de l'autorisation d'habiter le bien durant la période de réméré. Cette autorisation d'occupation est assortie d'une indemnité. Le montant de cette indemnité d'occupation est pondérée au regard de la nature de l'opération, du prix de vente et de la valeur locative moyenne pratiquée dans le voisinage. Si l'indemnité d'occupation est trop élevée, elle peut dissimuler un financement à un taux usuraire. Le taux d'usure correspond au taux d'intérêt maximum légal qu'un prêteur peut appliquer. Il a été jugé " que la vente à réméré peut constituer un pacte commissoire prohibé lorsque, portant sur la résidence principale du vendeur, elle dissimule une opération de crédit et a pour objet d'éluder les dispositions protectrices des emprunteurs relatives au taux d'usure. " (Cass. 3e civ. 24.06.2021 n° 18-19771). Dans ce cas, la vente peut être annulée.
La vente à réméré constitue une option intéressante pour un propriétaire en difficulté financière. Elle lui permet de bénéficier de liquidités importantes et immédiatement. Toutefois, l'avenir doit être certain. Ainsi, le propriétaire doit avoir des perspectives de rentrées d'argent à court ou moyen terme pour pouvoir exercer son option ou sa " faculté de rachat ". À défaut, il risque de perdre définitivement tout droit sur le bien immobilier. Des mécanismes de protection existent pour obtenir la nullité de l'opération, si les conditions sont réunies.