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Fiche pratique rédigée par Maître Esther LE GUELLEC
Maître LE GUELLEC

Comptes bancaires détenus à l'étranger : Quelle stratégie en cas d'absence de déclaration

Fiscal / Par Maître LE GUELLEC, Avocat, Publié le 21/03/2024 à 11h22
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La déclaration des comptes bancaires détenus à l'étranger concerne chaque résident fiscal en France. Une décision du Conseil d'État de mars 2023 revient sur les comptes détenus via des sociétés à l'étranger. Aujourd'hui, les contrôles fiscaux se multiplient s'agissant du défaut de déclaration, avec des amendes et redressements potentiellement importants à la clef.

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De nouvelles normes internationales d'échanges de renseignements

La norme CRS (Common Reporting Standard – ou norme commune de déclaration) est un outil mis en place dès 2014, à disposition de l'administration fiscale pour lutter contre la dissimulation de comptes détenus à l'étranger.

Cette norme a été élaborée à l'initiative de l'OCDE, dans le cadre de l'ensemble des travaux de ces dernières années sur l'échange automatique de renseignements et inspirée de la législation américaine bien connue sous le nom de " FATCA ".

Ainsi depuis fin 2016 (pour la France), les établissements financiers français et étrangers sont tenus de transmettre, de manière automatisée et annuellement, leurs données sur les comptes financiers de leurs clients non-résidents, aux administrations fiscales des pays partenaires de la norme (une centaine dans le monde)

Néanmoins, il est fréquent que le contribuable oublie de déclarer ce/ces comptes lors de la déclaration annuelle de ses revenus, pour diverses raisons. Parfois même, le contribuable n'a pas connaissance de l'existence de ce compte. C'est le cas notamment lors d'une donation d'un

parent établi à l'étranger ou de l'ouverture d'une succession internationale (parent décédé à l'étranger) : à cette occasion, certaines personnes découvrent qu'elles sont déjà titulaires, co-titulaires ou bénéficiaires, d'une procuration sur un compte à l'étranger et qu'elles ont, en toute bonne foi évidemment, omis de déclarer ce compte aux services fiscaux français.

Rappel du champ d'application de la déclaration de compte bancaire à l'étranger

Toute personne résidente fiscale de France doit déclarer à l'administration fiscale l'ouverture, la détention, l'utilisation et la clôture des comptes de toute nature à l'étranger (Article 1649 A du Code Général des impôts).

La déclaration se fait en même temps que la déclaration de l'ensemble des revenus (ou de résultat pour les entreprises éventuellement concernées), chaque année, sur le formulaire n°3916.

La déclaration n°3916 bis concerne quant à elle les comptes d'actifs numériques tels que les cryptomonnaies.

La déclaration doit être faite pour chaque compte et chaque année : Seule la fermeture du compte permet de ne plus être soumis à la déclaration.

Qui est concerné ?

En premier lieu, cette déclaration concerne toutes les personnes physiques résidentes fiscales de France s'agissant de leurs comptes ouverts, utilisés, détenus ou clos hors de France dont elles sont titulaires, co-titulaires ou bénéficiaires d'une procuration.

En second lieu, la déclaration concerne également les associations et les sociétés n'ayant pas la forme commerciale établies en France, à l'exception de celles qui ne déposent pas de déclarations de résultats.

S'agissant enfin de personnes physiques utilisant des comptes par l'intermédiaire d'une société établie à l'étranger (qui en est le titulaire), l'obligation déclarative n'était pas clairement établie.

Toutefois, dans une importante décision du 8 mars 2023 n°463267, le Conseil d'Etat a précisé que l'obligation de déclaration des comptes bancaires (dans sa version antérieure au 1er janvier 2019 en l'espèce) pèse sur toute personne physique, association ou société n'ayant pas la forme commerciale ayant utilisé un compte bancaire étranger, quel que soit le titulaire de ce compte, y compris notamment si ce titulaire est une société commerciale.

Une réponse ministérielle du 31 août 2023 précise enfin, à la suite de cette décision du 8 mars 2023, que l'obligation concerne notamment les contribuables bénéficiaires effectifs de ces comptes dont la propriété réelle est dissimulée derrière des entités juridiques interposées.

Ainsi, le bénéficiaire économique de ce compte est réputé détenir ce compte, même ouvert au nom d'une société commerciale étrangère.

Dans les années à venir, les contrôles sur la non-déclaration de ces comptes, que cette omission soit de bonne ou de mauvaise foi, vont se multiplier et cette obligation ne doit pas être prise à la légère.

A ce titre, l'administration fiscale a ajouté à sa Carte des pratiques et montages abusifs une fiche intitulée " Dissimuler la détention d'avoirs à l'étranger " notamment par le biais de sociétés commerciales interposées.

Quels comptes faut-il déclarer ?

Doivent être déclarés tous les types de comptes financiers, ouverts, détenus, utilisés ou clos à l'étranger au cours de l'année concernée.

Les comptes détenus auprès de banques en ligne installées à l'étranger sont bien évidemment à déclarer.

En revanche, ne sont pas concernés les comptes qui ont pour objet de réaliser en ligne des paiements d'achats ou encaissements afférents à des ventes de biens pour un montant inférieur à 10 000 € par an pour l'ensemble des comptes, à condition que ces comptes ayant servi à ces opérations soient adossés à un ou des comptes ouverts en France.

Quelles sont les sanctions en cas d'omission de déclaration ?

La sanction pour non-déclaration des comptes à l'étranger est lourde.

Elle est de trois ordres :

  • Cette omission (ou la souscription d'une déclaration incomplète) est soumise à une amende forfaitaire de 1 500 € par an et par compte non déclaré (portée à 10 000 € en cas de compte détenu dans un pays n'ayant pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative permettant l'accès aux renseignements bancaires). En pratique, compte tenu des délais de dépôt de déclarations de revenus, l'amende peut porter sur les quatre dernières années si le compte n'a jamais été déclaré.
  • Les sommes, titres ou valeurs en provenance de ces comptes sont présumées constituer des revenus imposables (sauf preuve contraire) et les redressements sont alors assortis d'une majoration de 80 %.
  • Les revenus ou bénéfices concernés par cette omission de déclaration peuvent faire l'objet d'un redressement pendant 10 ans. Toutefois par exception, cette extension du délai de contrôle n'est pas applicable si le contribuable apporte la preuve que le total des soldes créditeurs de ses comptes à l'étranger n'a pas excédé 50 000 € à un moment quelconque de la ou les années concernées par l'obligation déclarative. Dans ce cas, les redressements ne peuvent porter que sur 3 ans.

Quelle stratégie de régularisation en cas de défaut de déclaration ?

Plusieurs stratégies sont possibles lorsque l'administration fiscale n'a pas connaissance de ces comptes.

La première que l'on conseille généralement, notamment en cas de bonne foi avérée, est la régularisation de l'année en cours à savoir la déclaration spontanée du compte sur la dernière déclaration de revenus ainsi qu'éventuellement, les intérêts, dividendes ou plus-values liés à ce compte et qui auraient été omis.

Lorsque la régularisation porte sur plusieurs comptes et plusieurs années antérieures, une véritable réflexion doit être menée sur les enjeux financiers et fiscaux afin de préparer un dossier de régularisation fourni et documenté.

Dans ces différentes situations, il est toujours utile de se faire conseiller par un avocat fiscaliste afin d'adopter la bonne stratégie en fonction de chaque cas.

Une négociation ultérieure avec les services fiscaux sera souvent nécessaire afin de limiter les amendes et les redressements éventuels.

Que faire en cas de réception d'une proposition de " régularisation des avoirs détenus à l'étranger " ou d'un courrier relatif à " votre situation fiscale au regard d'un compte bancaire détenu à l'étranger " ?

Ce courrier vise à informer le contribuable de la connaissance par les services fiscaux d'un ou plusieurs comptes à l'étranger non déclaré.

On pourrait être tenté de contacter directement les services fiscaux, comme cela est souvent proposé dans les courriers type.

Il est néanmoins préférable de prendre contact avec un avocat fiscaliste pour mettre en place votre défense visant à limiter l'amende et les redressements éventuels.

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