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Dans un courant jurisprudentiel récent, le Conseil d'Etat vient remettre en cause une ancienne pratique de l'administration fiscale qui rejetait la déductibilité des management fees facturés par une société mère à une filiale, même si les prestations de services étaient réelles, dès lors que le service rendu était assimilable au travail du dirigeant et que la filiale ne rémunérait pas son dirigeant au titre de son mandat social.
Les contribuables qui avaient fait l'objet de redressements fiscaux sur ce sujet pourraient être amenés à faire des réclamations.
De nombreux groupes de sociétés, notamment parmi les petites ou moyennes entreprises, mettent en place des flux de refacturation entre une société mère et sa filiale. Les conventions relatives à des services spécifiques et documentés ne posent généralement pas de difficulté. Il en va différemment pour les services qui sont des fonctions normalement exercées par le dirigeant de la société, ou pour les services dont le libellé est tellement large qu'il s'apparente substantiellement à des prestations de direction.
Pour ces dernières prestations, l'administration fiscale a eu traditionnellement tendance à considérer que celle-ci doivent être formalisées au titre de la rémunération du mandat social proprement dit. Les flux de facturation intragroupe au titre d'une convention de prestation de services qui aurait été conclue par ailleurs étaient rejetés.
Ainsi, l'administration fiscale rejetait la déductibilité fiscale des charges de la filiale, mais sans remettre en cause l'imposition du produit chez la société mère. Il pouvait en résulter une double imposition économique.
Le contribuable avait beau objecter que le flux correspondait à des services réels. Cet argument de bon sens économique était inopérant, dès lors que le flux n'avait pas été formalisé juridiquement au titre de la rémunération du mandat social proprement dite.
Dans une série de décisions récentes, notamment un premier arrêt du 4 octobre 2023 puis un second du 24 avril 2024, le Conseil d'Etat est venu tempérer cette solution rigoureuse.
Le Conseil d'Etat juge ainsi que la conclusion par une société d'une convention de prestations de services avec une autre société pour la réalisation, par le dirigeant de la première, de missions relevant des fonctions inhérentes à celles qui lui sont normalement dévolues n'est pas un acte anormal de gestion. Pour cela, la société doit établir que ses organes sociaux compétents ont entendu en réalité rémunérer indirectement le dirigeant.
Le Conseil d'Etat clarifie aussi que l'absence de versement d'une rémunération à son dirigeant au cours d'un exercice ne constitue pas une décision de gestion faisant obstacle à la rémunération de ce même dirigeant au cours d'un exercice postérieur, le cas échéant à titre rétroactif, ou, au cours du même exercice, par l'intermédiaire d'une autre société.
Ainsi, le seul fait que le mandat social ne soit pas rémunéré en tant que tel n'est pas, en soi, de nature à faire obstacle à la déductibilité des management fees qui seraient refacturés par ailleurs.
Si ces développements sont sans doute de nature à atténuer la pratique des redressements fiscaux pour l'avenir, notamment dans les dossiers où la réalité des services est incontestable, il demeure que le sujet doit être abordé avec précaution par les dirigeants d'entreprise.
L'administration fiscale pourra toujours attaquer ces flux sous l'angle de la réalité des services, ou le caractère éventuellement excessif de montant. On peut aussi s'attendre à ce que l'administration fiscale continue à attaquer les flux de facturation, dans les cas où le dossier présente des indices selon lesquels les organes sociaux n'ont pas réellement entendu engager ces flux de facturation.
Les sociétés ayant fait l'objet de redressements fiscaux par le passé, et qui sont susceptibles d'être invalidés à la lumière des précisions récentes du Conseil d'Etat, pourront bien entendu envisager de déposer une réclamation, sous réserve que la période contrôlée puisse encore être contestée.
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