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Depuis la levée du verrou de Bercy, l'administration fiscale dénonce obligatoirement au procureur de la république le dossier d'un contribuable qui fait l'objet de redressements fiscaux avec plus de 100000 euros de rappels de droits, et lorsque des pénalités fiscales graves sont appliquées.
Le législateur avait prévu d'exclure de cette dénonciation obligatoire les cas de contribuables qui auraient souscrit spontanément des déclarations rectificatives. Mais un récent arrêt de la Cour de Cassation vient semer le doute sur l'efficacité de cette exclusion ...
Depuis la loi du 23 octobre 2018, l'administration est tenue de dénoncer au procureur de la République les dossiers de redressements fiscaux lorsque le montant des rappels de droits est supérieur à 100 000 euros, et que l'une des pénalités suivantes est appliquée :
- Soit la majoration de 100% pour opposition à contrôle fiscal
- Soit la majoration de 80%, notamment pour activité occulte, abus de droit, manoeuvres frauduleuses, ou dissimulation de prix
- Soit la majoration de 40%, notamment pour un manquement délibéré lorsqu'au cours des six années civiles précédentes le contribuable a déjà fait l'objet de pénalités fiscales graves.
Cette transmission automatique au parquet est de nature à ouvrir la voie à des poursuites pénales (en plus du redressement fiscal), en vue d'une répression pénale complémentaire contre le contribuable, pour fraude fiscale notamment.
Le législateur avait toutefois pris soin de préciser que cette transmission automatique ne s'appliquerait pas aux contribuables ayant "déposé spontanément une déclaration rectificative".
Ainsi, et bien que ces dispositions n'interdisaient aucunement à l'administration fiscale de porter plainte par ailleurs, le texte pouvait être interprété comme une incitation à déposer des déclarations rectificatives, afin d'éviter le risque pénal qui peut être très significatif selon les dossiers.
Dans un arrêt du 23 mai 2024, la Cour de Cassation rappelle que l'exonération des poursuites pénales dont peut bénéficier le contribuable qui a déposé spontanément une déclaration rectificative constitue une exception au mécanisme de dénonciation obligatoire, qui doit être appréciée strictement.
En conséquence, la Cour de Cassation juge qu'une déclaration rectificative spontanée qui a été rejetée par l'administration fiscale ne saurait faire obstacle à la dénonciation obligatoire du dossier au procureur de la république. Elle précise que les contestations sur la validité d'un tel rejet ne relèvent pas du juge pénal, mais du juge de l'impôt.
Dès lors, la déclaration rectificative spontanément déposée par le contribuable ne peut faire obstacle à la dénonciation obligatoire des faits que si elle n'a pas été "rejetée" par l'administration fiscale.
La notion de "rejet" d'une déclaration rectificative par l'administration, introduite ici par la jurisprudence, est sujette à de nombreuses interprétations. C'est donc source d'insécurité juridique.
La décision de la Cour de Cassation est susceptible de décourager certains contribuables à déposer spontanément des déclarations rectificatives, et donc de porter les dossiers au contentieux, puisque le risque pénal n'est pas effectivement éliminé, notamment en cas de "rejet" des déclarations rectificatives par l'administration. Pour autant, l'opportunité d'une régularisation fiscale spontanée est à apprécier au cas par cas, en fonction des faits et circonstances particulières.
Les contribuables ayant fait une régularisation spontanée, mais qui sont néanmoins visés par des poursuites pénales en suite d'une problématique de rejet de leurs déclarations rectificatives par l'administration, pourront quant à eux envisager un recours devant le juge de l'impôt en contestation de ce "rejet".
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