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L'utilisateur de service de paiement qui conteste être à l'origine d'une opération bancaire (fraude) dispose d'un délai de 13 mois non seulement pour signaler ladite opération frauduleuse à son établissement bancaire mais également pour saisir la juridiction compétente sous peine de forclusion. C'est ce qu'a rappelé la chambre commerciale de la Cour de cassation aux termes d'un arrêt du 2 mai 2024 (n°22-18.274).
L'article L133-24 du code monétaire et financier précise :
L'utilisateur de services de paiement signale, sans tarder, à son prestataire de services de paiement une opération de paiement non autorisée ou mal exécutée et au plus tard dans les treize mois suivant la date de débit sous peine de forclusion à moins que le prestataire de services de paiement ne lui ait pas fourni ou n'ait pas mis à sa disposition les informations relatives à cette opération de paiement conformément au chapitre IV du titre 1er du livre III.
Sauf dans les cas où l'utilisateur est une personne physique agissant pour des besoins non professionnels, les parties peuvent convenir d'un délai distinct de celui prévu au présent article.
Les dispositions du présent article s'appliquent, indifféremment de l'intervention d'un prestataire de services de paiement fournissant un service d'initiation de paiement dans l'opération de paiement.
Il découle sans ambiguïté de cet article que dès lors qu'un client nie être à l'origine d'une opération bancaire parce qu'il a été victime d'une fraude par carte bancaire, fraude par virement bancaire (etc..), il doit, sans tarder avertir sa banque.
Pourquoi ? D'une part, car cette dernière peut mettre en place le plus rapidement possible la procédure de " RECALL " qui permet à la banque du donneur d'ordre de tenter de rappeler les fonds auprès de la Banque du bénéficiaire.
D'autre part, cela permet également à la banque de stopper toute autre tentative de fraude sur les comptes bancaires de son client.
Mais surtout, en cas d'opérations de paiement non autorisées seules les dispositions des articles L 133-18 et suivants du code monétaire et financier sont applicables si bien que seul le délai 13 mois fixé par l'article L 133-24 du code monétaire et financier s'applique lorsqu'un client nie être à l'origine d'une opération bancaire.
Cela entraîne des conséquences importantes pour le client/victime de la fraude.
L'article L 133-24 du code monétaire et financier, comme évoqué ci-avant, indique seulement que l'utilisateur de service de paiement doit signaler, sans tarder à son établissement bancaire l'opération de paiement non autorisée.
Il serait alors possible de penser que le délai de prescription de droit commun de 5 ans pourrait être applicable à l'action en justice.
Pourtant, si la lettre de l'article L 133-24 du code monétaire et financier n'évoque que les rapports entre les clients et les prestataires de services de paiement, en d'autres termes, leur banque, et non l'éventuelle saisine d'un tribunal, la Cour de cassation a transmis à la Cour de Justice de l'Union Européenne (CJUE) une question préjudicielle portant sur la mise en cause de la responsabilité contractuelle de droit commun d'une banque au regard de la directive suite à laquelle l'article L 133-24 du code monétaire et financier a été adopté. Dans son arrêt du 2 septembre 2021, la CJUE s'oppose à ce qu'un régime de responsabilité autre que celui enfermé dans un délai de 13 mois soit ouvert à l'utilisateur de service de paiement.
Il en découle que ce délai de 13 mois enferme non seulement le délai de signalement à l'établissement bancaire mais également le délai d'action en justice du demandeur et donc du client victime.
Dans un arrêt récent du 2 mai 2024, la chambre commerciale de la Cour de cassation a consacré la position de la CJUE et confirmé que seul le délai de 13 mois était applicable en cas d'opération de paiement non autorisée.
Cette position est critiquable dès lors que, souvent, les clients/victimes vont d'abord tenter de se rapprocher de leur banque et parfois tenter la saisine d'un médiateur avant d'engager une action judiciaire.
Les délais de réponse de chacun de ces protagonistes peuvent être longs et peuvent rapidement atteindre plus de 13 mois. Or, un client/victime et souvent profane n'a pas nécessairement connaissance de ce délai qui lui est imposé. Il semble légitime que le client souhaite attendre la réponse de sa banque et/ou du médiateur avant d'envisager de donner une suite judiciaire à son affaire. Cela d'autant plus que ce délai de forclusion est en principe insusceptible de suspension et d'interruption contrairement au délai de prescription.
Ce délai de treize mois est extrêmement court et va à contre-sens de la protection des consommateurs.
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