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L'adoption internationale revêt souvent l'aspect d'un parcours du combattant. En effet, pour qu'un enfant étranger puisse être adopté en France - ou que son adoption prononcée à l'étranger soit prise en considération par les institutions françaises - il faut que la loi personnelle des adoptants le permette mais encore que la loi personnelle de l'enfant le permette également.
La Cour de Cassation en a justement déduit qu'elle ne pouvait prononcer l'adoption (simple ou plénière) d'un enfant simplement recueilli dès lors que sa loi personnelle prohibe l'adoption alors qu'il n'est pas né et ne réside pas habituellement en France.
Ainsi en est-il , le plus souvent des enfants originaires des pays d'Afrique du Nord puisque leurs législations prohibent l'adoption qui ne serait pas conforme à la vision coranique de la famille essentiellement fondée sur la consanguinité et l'alliance. C'est le cas notamment de l'Algérie du Maroc et de la Mauritanie. La "kafala" est une institution voisine qui s'apparente davantage à une délégation de l'autorité parentale et ne constitue pas une adoption au sens du droit français.
En effet, la loi n° 1958-0027 du 4 mars 1958 régit la matière en ses articles 8 à 17. Plus spécifiquement, l'article 10 § 2 de ce texte qui prévoit que "un tunisien peut adopter un étranger" permet d'en déduire, a contrario qu'un couple d'étrangers ne peut adopter un enfant tunisien.
La procédure d'adoption en droit tunisien est assez proche de l'adoption que nous connaissons en droit français. Cependant, à la différence de "notre" procédure strictement administrative (même si elle peut faire l'objet d'un contrôle ultérieur du juge judiciaire), la procédure tunisienne prévoit que le recueil de consentement du ou des parents de l'adopté est effectué par le juge cantonal.
Pour la suite, sauf en ce qui concerne l'adoption entre particuliers qui ne sera pas traitée ici, l'enfant est confié à une institution publique, l'Institut National de Protection de l'Enfance (I.N.P.E.) qui exerce la tutelle de l'enfant et donnera son consentement à l'adoption devant le juge cantonal. Les candidats à l'adoption doivent être agréés par la commission d'adoption, de tutelle officieuse et de placement familial (qui joue le rôle de la commission d'agrément).
Le consentement donné par la directrice de l'I.N.P.E. devant le juge cantonal l'est de manière irrévocable et dans des termes non équivoques repris dans l'attestation délivrée pour permettre la procédure de transcription : "l'enfant xxx est à la charge des époux xxx en vue d'une adoption plénière au sens du droit français depuis le (date du placement en vue d'adoption) avec le consentement définitif et irrévocable de la directrice de l'I.N.P.E. suite à la rupture complète et irrevocable du lien de filiation préexistant de l'enfant en question".
La procédure de transcription en France pourrait n'être qu'une simple formalité ; il n'en est rien.
Les décisions d'adoption prononcées à l'étranger produisent immédiatement tous leurs effets en France sans qu'il soit nécessaire de leur accorder un exequatur. Cela veut donc dire qu'une décision d'adoption prononcée à l'étranger produit, sans qu'elle soit soumise à un contrôle juridictionnel quelconque en France, des effets de plein droit et cela dès son prononcé à l'étranger, indépendamment de toute mesure de transcription ou de publicité : c'est l'effet immédiat de plein droit des décisions étrangères rendues en matière d'état des personnes.
Cette efficacité immédiate est subordonnée à la régularité internationale de la décision : il faut que le juge qui a prononcé l'adoption ait été internationalement compétent, que la décision ne soit pas contraire à l'ordre public, qu'elle applique la bonne loi et enfin qu'il n'y ait pas eu fraude.
Comme cette irrégularité internationale peut toujours être recherchée par toute personne qui aurait intérêt, il peut être opportun de " purger " la décision en la faisant transcrire car à cette occasion, le Parquet vérifiera ces différents points.
En matière d'adoption d'un enfant tunisien, le parquet de Nantes auquel incombe cette vérification refuse la transcription des jugements d'adoption plénière. Il se fonde pour cela sur un arrêt rendu le 14 février 1980 par la Cour d'appel de Tunis qui a affirmé, alors même que l'article 13 § 3 de la loi tunisienne exprime clairement que le jugement ainsi rendu est définitif, que le consentement venant soutenir le jugement d'adoption serait révocable par le consentement mutuel des parties en cause. L'adoption tunisienne ne serait donc pas, aux yeux du Parquet nantais, irrévocable et ne pourrait donc être assimilée, dans ces effets, à une adoption plénière telle que prévue dans notre législation.
Pourtant, s'agissant des adoptions prononcées à partir de l'institution tunisienne de protection de l'enfance (I.N.P.E.), il sera observé que l'attestation qui est délivrée par la directrice de cet organisme dans le cadre de cette procédure, mentionne expressément que le consentement a été donné librement, était éclairé en ce qui concerne les conséquences de l'adoption et le caractère complet et irrévocable de la rupture, postérieurement à la naissance de l'enfant et ce sans contrepartie, ce qui est la reprise des exigences de la loi française en matière d'adoption plénière telles qu'énoncées à l'article 370-5 du code civil.
C'est dans ces conditions que par un jugement rendu le 23 février 2015, le Tribunal de Grande Instance de Toulouse siégeant en chambre du conseil a considéré que l'abandon judiciairement constaté de l'enfant par sa mère avant même le début de la procédure d'adoption avait rompu tout lien de droit entre eux et que le caractère circonstancié du consentement avait été donné par la directrice de l'I.N.P.E., en pleine connaissance de cause des conséquences de l'adoption plénière de l'enfant en droit français.
En conséquence, il a prononcé l'adoption plénière de l'enfant.
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