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Suite à l'entrée en vigueur le 06 avril 2021 du décret n° 2021-360 du 31 mars 2021 relatif à l'emploi d'un salarié étranger, la demande d'autorisation de travail qui se faisait auparavant via le formulaire-papier cerfa n°15186*03 adressée à la DREETS (anciennement appelée DIRECCTE) ne peut désormais plus se faire qu'en ligne, sur une plateforme dédiée du Ministère de l'Intérieur. Supposée faciliter la demande d'autorisation de travail, et accélérer le processus de la demande, il s'avère que la plateforme n'a fait que compliquer les choses et engendre un contentieux qui ne semblait pas prévu par ses concepteurs.
La plateforme ne délivre les autorisations de travail que pour les étrangers déjà régulièrement présents sur le territoire français (hypothèse d'un changement de statut), pour les étudiants ayant besoin de dépasser le quota d'heures légale de 964 heures par an attaché à leur titre, et enfin pour les ressortissants étrangers à l'étranger qui veulent venir travailler en France en demandant un visa portant la mention salarié ou saisonnier.
La plateforme exclue donc de fait les étrangers en situation irrégulière qui solliciteraient une admission exceptionnelle au séjour.
L'autorisation de travail étant un document nécessaire à l'enregistrement de la demande de changements de statut, à la demande de visa ou à la conclusion d'un contrat à temps plein pour un étudiant, cette demande doit donc obligatoirement et impérativement être déposée, et répondue, avant l'expiration du titre de séjour en cours et le dépôt du changement de statut à la Préfecture ou le dépôt du passeport au Consulat.
Suite au dépôt de la demande d'autorisation de travail sur la plateforme, une attestation de dépôt est automatiquement générée et est envoyée par courriel à l'employeur. Contrairement aux délais d'instruction de demande de titre de séjour qui sont enfermés dans un délai de 4 mois par des dispositions du Code de l'entrée et du séjour des étrangers et du Droit d'asile (CESEDA), la loi ne prévoit ici aucun délai pour la plateforme.
En l'absence de délai d'instruction indiqué, le délai de droit commun de deux mois à compter de l'enregistrement du dossier par l'administration semble être de mise, néanmoins force est de constater que d'une part ce délai peut être allègrement dépassé par la plateforme, sans conséquences, et d'autre part la plateforme ne donnant pas d'attestation d'enregistrement (un équivalent du " récépissé " pour une demande de titre de séjour) et sollicitant presque inévitablement et régulièrement des pièces complémentaires, le délai de droit commun de deux mois doit souvent repartir de zéro après envoi des pièces complémentaire, rallongeant ainsi indéfiniment la procédure.
L'accès à la plateforme après le dépôt du dossier est très restreint : une fois le dossier déposé, seuls les services du ministère de l'Intérieur peuvent en autoriser l'accès à l'occasion d'une demande de complément de dossier, d'autre part, il n'est pas possible d'ajouter des pièces complémentaires dans la demande : Seules les pièces demandées sont enregistrées.
Il est donc impératif d'avoir immédiatement toutes les pièces nécessaires au dépôt de la demande, à défaut de quoi, la demande ne sera plus accessible par la suite pour déposer le reste du dossier.
Par ailleurs, lorsqu'une demande de complément de dossier est adressée à l'employeur, ce dernier a seulement 14 jours pour envoyer le complément demandé, à défaut de quoi la demande sera clôturée.
Après presque un an de fonctionnement, force est de constater que la plateforme souffre de différents défauts de conception entachant la bonne instruction du dossier.
Par exemple, un bug récurrent intervenant sur la plateforme a attrait à la convention collective visée : Si la convention collective correspondant au contrat de travail visé ne fait pas partie de la base de donnée (incomplète) de la plateforme, l'agent instructeur ne fera que renvoyer indéfiniment un courriel de demande de complément de dossier pour demander à ce que soit bien indiquée la convention collective correspondante, et à force de répondre toujours la même chose (indisponibilité de la convention collective sur la plateforme), le dossier finira par être clôturé.
Autre bug récurrent concernant les métiers où il n'y a pas besoin de produire un diplôme, comme par exemple le métier de " chauffeur-routier " : Si aucun document n'est mis dans la case " diplôme " du formulaire, alors le formulaire ne veut pas s'enregistrer sur la page suivante et il est impossible de déposer la demande d'autorisation de travail. Or si l'on met le permis de conduire pour poids-lourds dans la case " diplôme ", le formulaire de demande s'enregistre bien, malheureusement quelques jours après le dépôt, l'agent-instructeur envoie automatiquement un courriel notifiant l'incomplétude du dossier, car il manque le diplôme du salarié dans la case " diplôme " du formulaire. Ici encore, à force de répondre toujours la même chose (pas de diplôme préalable requis mais seulement un permis poids-lourds), le dossier finira par être clôturé.
Force est donc de constater que les mails de relance sur l'incomplétude du dossier sont des mails automatiques qui ne prennent pas en compte la spécificité de la demande, si cette dernière ne rentre pas " dans les clous " du formulaire en ligne. Tout particularisme est sanctionné par une clôture.
Les délais anormalement longs pour obtenir l'autorisation de travail ont souvent pour effet de s'approcher inexorablement de la date d'expiration du titre de séjour en cours. Or malgré qu'une demande de changement de statut doit se faire dans les 2 à 4 mois précédant l'expiration du titre de séjour en cours, il n'est absolument pas possible pour l'étranger de faire enregistrer dans demande de changement de statut sans joindre à son dossier l'autorisation de travail correspondante, à défaut de quoi sa demande sera jugée comme étant incomplète et donc irrecevable.
De même, si le CESEDA autorise le dépôt d'une demande de renouvellement/changement de statut dans un délai maximum de 6 mois suivant l'expiration du précédent titre (sous réserve de s'acquitter d'une taxe de retard), il ne serait pas possible de déposer ou redéposer la demande d'autorisation de travail sans avoir un titre de séjour en cours de validité, car la demande sera alors considérée comme incomplète et fera l'objet d'une clôture.
Ainsi, l'étirement du délai d'instruction de la demande d'autorisation de travail peut, de manière impitoyable, mener l'étranger à être en situation irrégulière, car l'empêche de déposer et de faire enregistrer à temps sa demande de changement de statut.
Il est nécessaire de suivre attentivement les délais et les motifs invoqués par la plateforme dans l'instruction de la demande d'autorisation de travail, car en laissant s'écouler un temps d'instruction plus que nécessaire, l'étranger risque de se trouver en situation irrégulière sans pouvoir justifier qu'il a fait les diligences nécessaires à temps.
Il est toujours possible d'exercer un recours contre la plateforme qui ne respecte pas un délai légal, ou raisonnable, afin d'obtenir un jugement qui la condamne à rendre rapidement une décision ; cependant ledit recours suppose un suivi assidu, preuves à l'appui, des diligences effectuées par l'employeur.
Article écrit par Monsieur NGOM Assane pour le Cabinet TSARANAZY
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