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La théorie des troubles anormaux de voisinage obéit à un régime juridique qui lui est propre : si sa finalité consiste à obtenir la réparation d'un dommage, à l'image de la mise en oeuvre de la responsabilité civile, la démonstration d'une faute n'est cependant pas requise pour l'appliquer.
Qu'elle soit d'origine contractuelle (manquement d'une partie aux stipulations d'un contrat) ou délictuelle (faute ou imprudence causant un dommage à autrui), l'engagement de la responsabilité civile nécessite de rapporter la preuve de 3 conditions cumulatives :
1) une faute : il faut démontrer un manquement de celui dont on souhaite engager la responsabilité. Cette faute consiste soit en un manquement aux obligations contractuelles lorsqu'une convention a été conclue, soit en un manquement volontaire ou involontaire causant un dommage à autrui (ainsi peut-on par exemple citer le cas d'un piéton qui se fait percuter par un cycliste) ;
2) un préjudice (ou dommage) : celui qui souhaite engager la responsabilité d'une tierce personne doit avoir subi un dommage, de quelque nature qu'il soit (financier, matériel, corporel, etc...) ;
3) un lien de cause à effet entre la faute et le préjudice subi : le manquement de la partie fautive doit être directement, et au moins partiellement, à l'origine du préjudice causé dont il est demandé réparation.
Dans de nombreuses situations du quotidien, la responsabilité civile apparaît toutefois inopérante pour obtenir réparation de son dommage, notamment lorsque celui-ci ne résulte pas d'un comportement fautif.
C'est particulièrement vrai dans les rapports entre voisins. L'on pense par exemple aux nuisances sonores générées par un animal ou un équipement du logement (tel une pompe à chaleur).
Les tribunaux ont ainsi donné naissance à la théorie des troubles anormaux de voisinage afin d'obtenir réparation de son préjudice indépendamment de l'existence d'une faute à son origine.
Les désagréments résultant d'une relation de voisinage ne trouvent pas toujours leur cause dans le comportement fautif de l'une ou l'autre des parties.
En pareil cas, afin de permettre à celui qui s'estime victime d'un dommage issu d'un rapport de voisinage d'en demander réparation, le juge a eu recours au critère de " l'anormalité " du trouble de voisinage.
Ainsi, même en l'absence de faute, toute gêne excédant les inconvénients normaux de voisinage (tel la tonte d'une pelouse) peut donner lieu à réparation.
Deux conséquences majeures se dégagent de ce principe :
d'une part, le caractère anormal ou non du trouble résulte d'une appréciation au cas par cas : la durée, l'intensité des nuisances, les circonstances de temps (jour/nuit) comme de lieu (ville/campagne) sont autant de critères utiles à l'appui de la démonstration de l'anormalité du trouble ;
d'autre part, un trouble anormal de voisinage peut être caractérisé malgré l'absence totale de faute de celui auquel on l'impute, et inversement. Ainsi, de la même façon que le respect des règles d'urbanisme n'exclut pas l'existence éventuelle de troubles anormaux de voisinage, leur violation n'est pas nécessairement la source de troubles anormaux du voisinage.
L'anormalité a ainsi été retenue pour la construction d'un garage de huit mètres de haut implanté en limite de propriété qui était notamment à l'origine d'une perte importante d'ensoleillement et réduisait la vue sur le paysage, alors même qu'il avait été édifié conformément aux règles d'urbanisme et au permis de construire délivré.
Cette théorie des troubles anormaux du voisinage constitue ainsi un parfait exemple de régime de responsabilité objective, c'est-à-dire une responsabilité sans faute.
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