Hajar, 23 ans, vient nous voir en consultation
Hajar est entré en France avec un visa étudiant en 2015. Il a pu demander une carte de séjour étudiant l'année suivante, suite à son VLS-TS, malgré son redoublement. Mais au vu de ses difficultés à suivre les cours, il a choisi de travailler à temps partiel sans assurer son assiduité à l'université. Il n'a pas demandé à renouveler son titre de séjour et celui-ci a expiré en 2017, mais entretemps il s'est marié et attend un enfant. Sa compagne est également d'origine étrangère, elle travaille et possède un titre de séjour VPF, la naissance de leur enfant est prévue pour mi-2018.
Nous sommes à la fin de l'année 2017 et il nous demande s'il est possible de faire un changement de statut vers une carte de séjour Vie Privée et Familiale (VPF), ou s'il risque un refus avec une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF) à la clef.
C'est son motif de consultation, mais plusieurs éléments sont à prendre en compte pour lui répondre.
Existe-t-il une possibilité d'un changement de statut ?
Non, ce n'est pas possible car il ne s'agit plus d'une demande de changement de statut. Un changement de statut signifie que vous êtes en situation régulière sous un statut particulier et que vous souhaitez changer l'intitulé de ce statut sur votre titre de séjour. Dans notre cas, l'expiration du titre de séjour étudiant signifie qu'il est en situation irrégulière et qu'il n'est plus éligible à un changement de statut.
En conséquence la seule option disponible pour Hajar est une demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale. C'est une procédure difficile et souvent aléatoire, car cette régularisation repose sur beaucoup de justificatifs et reste entièrement soumise à l'appréciation du préfet, avec des chances importantes de rejet.
Le retard de sa consultation lui a été dommageable
Au vu de la situation décrite par Hajar, celui-ci aurait été tout à fait éligible à un regroupement familial sur place afin d'obtenir facilement un titre de séjour VPF. En effet il répond aux conditions minimales pour cette procédure notamment :
- Un séjour régulier de plus de 18 mois ;
- Un mariage en France avec une personne situation régulière et qui travaille ;
- Une source de revenue puisqu'il a lui-même un travail.
Sa situation lui était ainsi favorable à un changement de statut au moment du renouvellement de son titre de séjour étudiant.
Il a cependant tardé à consulter un avocat et cette possibilité ne lui est plus accessible car il n'est plus en situation régulière sur le territoire.
Et l'admission exceptionnelle ?
Revenons maintenant à la situation actuelle d'Hajar puisqu'il attend la naissance d'un enfant, cela pourrait-il lui permettre de régulariser son séjour, notamment avec un statut VPF ?
Malheureusement pour lui, l'attente d'un enfant ne change rien à la situation. Les principaux critères posés par la loi pour une admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale sont :
- Au moins 5 ans de résidence en France,
- Au moins 18 mois de vie commune avec votre conjoint marié,
- Justifier de conditions d'existence et de ressource suffisantes (c'est à dire que vous et votre conjoint gagnez respectivement le SMIC),
- Justifier d'une insertion et d'une intégration dans la société française (maîtrise de la langue française, validation de diplômes français, paiement d'impôts, activité associative, suivi et validation de formations, etc....),
- Justifier d'absence de liens dans le pays d'origine.
Bien que la présence d'un enfant soit un point essentiel de la demande, il faut que celui-ci soit scolarisé depuis au moins 3 ans. Ce qui n'est pas non plus le cas pour Hajar.
Que faire alors ?
Le meilleur conseil qu'on puisse lui donner dans sa situation est de continuer à constituer mois après mois des preuves de vie, des justificatifs d'intégrations et d'insertion dans la société, garder contact avec un conseiller juridique (juriste ou avocat) afin de déterminer les opportunités nouvelles ou d'être assisté en cas de difficultés (contrôles, arrestations, changement de situation familiale, etc.). Une demande de titre de séjour dans sa situation administrative, familiale et professionnelle entrainerai un refus catégorique et une OQTF.
En conclusion de cette rencontre, Hajar n'est pas du tout éligible à une procédure d'admission exceptionnelle. Il peut toujours en faire la demande, mais celle-ci n'aurait pas d'intérêt.
Une autre leçon importante à tirer de cette expérience est que son retard à la consultation d'un avocat lui a grandement compliqué sa situation administrative en France, et cela au détriment de sa nouvelle famille, car il ne faut pas oublier que l'hébergement d'une personne en situation irrégulière est condamnable par la loi.