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La question s'est posée durant de nombreux mois : puis-je suspendre le paiement du loyer de mon bail commercial ? Le monde des affaires est en permanente mouvance. Les défis auxquels les entrepreneurs sont confrontés sont nombreux. Parmi les préoccupations majeures apparait la gestion des coûts opérationnels, dont le loyer du bail commercial. Que se passe-t-il lorsque des circonstances imprévues surviennent, rendant difficile, voire impossible, le paiement du loyer ? Les récents évènements ont conduit certains locataires à envisager de suspendre le paiement de leur loyer pour cas de force majeure. Mais la Cour de cessation a écarté ce fondement. Dans cet article, nous allons examiner comment le loyer peut être révisé plutôt que suspendu.
Par un arrêt du 15 juin 2023 (Cass. Civ. 3e, 15 juin 2023, n° 21-10.119), la Cour de cassation affirmé qu'il n'était pas possible pour un locataire d'invoquer la force majeure pour suspendre son obligation contractuelle de paiement du loyer.
Cette décision consolide la position en faveur des propriétaires.
Elle apporte une conclusion claire aux litiges concernant le sort des loyers dus pendant la période de confinement national lié au COVID.
Pour parvenir à cette conclusion, la Cour de cassation a appliqué de manière stricte les conditions de la force majeure.
Elle a notamment apporté des précisions importantes pour délimiter la notion d'irrésistibilité.
En se fondant sur le principe que l'irrésistibilité exige que le débiteur soit confronté à une situation insurmontable, l'empêchant de mettre en place des alternatives pour remplir son obligation, la troisième chambre civile a mis un terme à toute incertitude.
Elle a statué en indiquant que l'irrésistibilité ne pouvait être établie que dans le cas où l'exécution de l'obligation était rendue totalement impossible, et non simplement plus difficile ou coûteuse.
Cette interprétation rigoureuse reflète probablement une volonté de renforcer la stabilité des engagements contractuels face à la crise sanitaire.
Pour la Cour de cassation, il y a en sous-jacent l'idée que, dans le monde des affaires, un commerçant peut plus aisément supporter un tel évènement sur un temps limité grâce à sa trésorerie ou à une assurance de perte de chiffre d'affaires.
Le commerçant étant censé projeter son activité sur le long temps.
En plus de la force majeure, la Cour de cassation a écarté la possibilité pour le locataire d'un bail commercial de se référer à l'exception d'inexécution, à l'obligation de délivrance et à la perte du local pour s'exonérer de son obligation de payer les loyers.
La Cour de cassation a néanmoins pris en considération le fait que le bailleur avait proposé un moratoire sur le paiement des loyers.
Elle a conclu que le contrat avait été exécuté loyalement d'un commun accord.
Même en cas de force majeure, il semble que le locataire puisse faire appel au principe d'exécution de bonne foi.
Le moratoire négocié vaudra pour modifications contractuelles.
Surtout, un autre fondement juridique est en débat depuis la survenance de la pandémie mondiale : la révision pour imprévision.
La dernière réforme du Code civil l'a introduite à l'article 1195 (Ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats).
Selon ce fondement, en cas de changement de circonstances imprévisible au moment de la conclusion du contrat, rendant son exécution excessivement onéreuse, et en cas d'échec des négociations entre les parties, le juge a le pouvoir de réviser ou de résilier le contrat.
À ce jour, la Cour de cassation n'a pas rendu de décision sur le fondement de la révision pour imprévision. Une voie reste donc ouverte et semble pouvoir être utilement exploitée.
En effet, ce régime hybride concentre à la fois la négociation contradictoire et un moyen d'ajuster temporairement le contrat.
?? La révision ne s'applique qu'à l'avenir et ne permet pas de suspendre le paiement au moment de l'incident.
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