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Le télétravail désigne " toute forme d'organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l'employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l'information et de la communication " (C. trav., art. L. 1222-9).
Ainsi, le télétravail n'étant qu'une modalité d'organisation de travail, l'employeur conserve, au même titre que lorsque le travail est effectué sur site, le pouvoir d'encadrer et de contrôler l'exécution des tâches confiées à son salarié.
Néanmoins, ce pouvoir ne saurait être exercé de manière excessive.
Ainsi, lorsque le salarié n'est pas présent dans les locaux de la société et travaille depuis chez lui, dans quelles limites l'employeur peut-il assurer son pouvoir de contrôle à distance ?
Chaque employeur est soumis à une obligation de loyauté envers ses salariés.
Il doit à ce titre les informer, préalablement à leur mise en oeuvre, des éventuels dispositifs de contrôle de leur activité. Un employeur qui viendrait à manquer à cette obligation pourra voir sa responsabilité engagée et les preuves obtenues à l'aide de tels dispositifs ne peuvent pas être invoquées pour justifier une sanction.
Ainsi, les salariés doivent être informés de tous les dispositifs de surveillance auxquels ils sont soumis (C. trav., art. L. 1222-4) : écoutes téléphoniques (Cass. soc., 14 mars 2000, 98-42.090), autocommutateurs, enregistrements vidéo ou sonores, traçage des connexions informatiques, géolocalisation type GSM ou GPS, badges électroniques, recours à une société de surveillance (Cass. soc., 15 mai 2001, 99-42.219) ou à des détectives privés (Cass. soc., 23 nov. 2005, 03-41.401), etc.
Par ailleurs, le CSE doit être informé et consulté sur les moyens et techniques permettant un contrôle de l'activité des salariés, préalablement à leur mise en oeuvre.
À défaut, l'employeur s'expose à une condamnation pour délit d'entrave (C. trav., art. L. 2312-38).
En cas de doute, les membres du CSE peuvent faire usage de leur droit d'alerte pour faire cesser les contrôles menés à l'insu des salariés et obtenir la destruction des preuves ainsi obtenues (Cass. soc., 10 déc. 1997, 95-42.661).
Un questions/réponses de la CNIL (Commission nationale de l'informatique et des libertés) sur le télétravail du 8 septembre 2021 apporte des précisions sur les possibilités de l'employeur en la matière, ainsi que sur les limites qu'il doit respecter.
Concernant les représentants du personnel, la CNIL énonce, dans son questions/réponses, que " l'information et la consultation des représentants du personnel participent à une meilleure transparence et au dialogue social, et constituent des conditions essentielles de mise en ?uvre de ces dispositifs [de surveillance] ".
Ainsi, selon la CNIL, les systèmes suivants sont à prohiber :
Pour ce qui est de la visioconférence, la CNIL considère que l'activation des caméras constitue un traitement de données personnelles, qui peut conduire à révéler des " informations intimes ". Les employeurs sont donc invités à privilégier les solutions de visioconférence qui permettent aux utilisateurs de flouter l'arrière-plan, afin de permettre aux participants de ne pas faire apparaître des images de leur domicile ou de tiers qui passeraient dans le champ de vision de la caméra. Le recours à la visioconférence depuis leur domicile ne devrait pas conduire les salariés à révéler davantage d'informations personnelles que lors d'une réunion sur leur lieu de travail.
La Commission recommande de préférer un contrôle de la réalisation du travail par objectifs pour une période donnée, lesdits objectifs devant être raisonnables, susceptibles d'être objectivement quantifiés et contrôlables à des intervalles réguliers. Un compte rendu régulier peut aussi être demandé au salarié.
La Cour de cassation s'est prononcée sur la licéité d'autres moyens de contrôle.
Elle a ainsi jugé que le contrôle du travail d'un salarié par un huissier de justice constitue un procédé licite de surveillance ne nécessitant pas l'information préalable de celui-ci (Cass. soc., 10 oct. 2007, 05-45.898), sauf si l'huissier a recours à un stratagème pour confondre le salarié, auquel cas la preuve ainsi recueillie est irrecevable (Cass. soc., 18 mars 2008, 06-40.852).
De façon générale, si l'employeur a le pouvoir de contrôler et de surveiller l'activité de son personnel pendant le temps de travail, il ne peut mettre en oeuvre un dispositif de surveillance clandestin et à ce titre déloyal (Cass. soc., 18 mars 2008, 06-45.093).
Par exemple, l'écoute d'une communication téléphonique réalisée par une partie à l'insu de l'auteur des propos tenus constitue un procédé déloyal et donc un mode de preuve illicite (Cass. soc., 16 déc. 2008, 07-43.993).
L'employeur doit toujours justifier que les dispositifs mis en oeuvre sont strictement proportionnés à l'objectif poursuivi et ne portent pas une atteinte excessive au respect des droits et libertés des salariés, particulièrement le droit au respect de leur vie privée.
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