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En application de l'article L.1226-2 du Code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail, consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ;
Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise.
L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail.
Selon la jurisprudence, si l'avis du médecin conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité de son reclassement dans l'entreprise, l'employeur n'est pas dispensé de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, au sein du groupe auquel elle appartient, au besoin, par la mise en oeuvre de toutes mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail (Cass. Soc. 3 mars 2003, n°01-44.695 ; Cass. Soc. 10 mars 2004, n°03-42.744 ; Cass. Soc. 21 septembre 2005, n°03-45.988).
Ainsi l'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise ne signifie pas l'inaptitude au travail.
L'employeur est tenu, en vertu de l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur lui, de respecter les avis émis par le médecin du travail sur la santé de ses salariés ; qu'il ne peut donc, dans le cadre de la recherche de reclassement du salarié déclaré inapte à son poste, méconnaître les contreindications prescrites par le médecin du travail.
Dans l'arrêt de la Cour d'appel de CAEN, confirmé par la Cour de cassation le 20 mars 2013, il a été jugé que le licenciement de Madame X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société SIEMENS à lui payer la somme de 30.000 euro; à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, outre les frais irrépétibles
L'employeur a formé un pourvoi au motif que :
- Il ressort des constatations des juges du fond qu'après avoir déclaré Madame X... inapte à tout poste dans l'entreprise, le médecin du travail a précisé à deux reprises à la Société SIEMENS que, compte tenu de l'état de santé de la salariée, aucune proposition de poste n'était envisageable dans l'entreprise, le groupe auquel elle appartient et même les sociétés en liens opérationnels avec elle ; que cette position formulée en des termes aussi généraux qu'impératifs s'imposait à la Société SIEMENS et faisait objectivement obstacle à la recherche de postes éventuellement disponibles au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en décidant que, nonobstant ces avis du médecin du travail, la Société SIEMENS aurait été tenue d'accomplir des recherches de reclassement et de formuler des propositions nécessairement incompatibles avec l'état de santé de la salariée, la cour d'appel a violé les articles L.1226-2 et L.4121-1 du Code du travail.
La cour de cassation sanctionne cette position par laquelle l'employeur s'autodispense de la recherche d'emploi aux motifs que :
"Attendu qu'ayant exactement retenu qu'il incombait à l'employeur et non au médecin du travail, dont les réponses n'avaient été que d'ordre général, de justifier du respect de l'obligation de reclassement, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation ou transformation du poste de travail, la cour d'appel, qui a relevé qu'en dépit de la possibilité de reclassement qu'offrait une société du groupe, aucune proposition n'avait été faite à la salariée, a légalement justifié sa décision ;Cour de cassation-chambre sociale"
Audience publique du mercredi 20 mars 2013
N° de pourvoi: 12-10101----Non publié au bulletin ----Rejet
M. Chollet (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat(s)
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 28 octobre 2011), que Mme X... a été engagée le 1er octobre 1990 en qualité de secrétaire et promue responsable d'administration des ventes, par la société Cerberus Guinard, aux droits de laquelle vient la société Siemens ; que la salariée, en arrêt de travail à compter du 3 juin 2005, a été déclarée par le médecin du travail inapte à tous postes dans l'entreprise, apte au même poste dans une autre entreprise ; qu'elle a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement le 27 juillet 2007 ; qu'invoquant au principal la nullité de son licenciement, elle a saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident de la salariée, qui est préalable :
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de nullité du licenciement au titre du harcèlement moral alors, selon le moyen :
1°/ que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en jugeant, pour débouter Mme X... de sa demande de nullité du licenciement, qu'elle n'apportait aucun élément probant de nature à caractériser un harcèlement moral cependant qu'il résultait de ses propres constatations que plusieurs missions auparavant attachées au poste de responsable administration des ventes de Mme X... lui avaient été retirées, qu'un poste de responsable opérationnel de l'administration des ventes et de la gestion administrative du site avait concomitamment été créé et confié à une autre personne et que les certificats médicaux produits établissaient que les arrêts de travail de Mme X... résultaient d'un état dépressif réactionnel à des problèmes d'environnement professionnel, tous éléments de nature à faire présumer d'un harcèlement moral, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1154-1 et L. 1152-1 du code du travail ;
2°/ qu'en rejetant la demande en nullité du licenciement fondée sur le harcèlement moral subi par Mme X..., motif pris qu'elle ne produit que des témoignages d'amis ou de proches, extérieurs à l'entreprise, se faisant l'écho de son mal être au travail et de situations vécues comme conflictuelles, tandis que l'extériorité à l'entreprise de ces témoignages ne les privait pas de leur pertinence au titre d'éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
3°/ que les juges doivent examiner l'intégralité des faits avancés par le salarié et rechercher si l'ensemble des éléments établis par le salarié ne sont pas de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en ne se prononçant pas sur le fait, invoqué par Mme X..., que le déclassement subi avait eu des conséquences sur sa rémunération qui, pour la première fois depuis son entrée dans la société, n'avait pas bénéficié, en 2005, d'une réévaluation annuelle, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur l'intégralité des faits avancés par le salarié et n'a pas recherché s'ils étaient de nature à faire présumer un harcèlement moral, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
4°/ que le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; que Mme X... se prévalait devant la cour d'appel du compte rendu de son entretien préalable au licenciement, établi par Mme Y..., salariée de l'entreprise l'ayant assistée, au soutien du fait que la directrice des ressources humaines avait elle-même reconnu qu'elle était marginalisée ; qu'en considérant, pour les écarter, que les éléments au soutien de l'existence d'une marginalisation émanaient de la transcription que Mme X... faisait elle-même de l'entretien, quand il n'était pas contesté que la transcription produite émanait de la salariée l'ayant assistée, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que la réorganisation des services avait eu des conséquences sur l'ensemble des postes de direction, la cour d'appel, examinant l'ensemble des griefs invoqués par la salariée sans être tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a apprécié souverainement les éléments de fait et de preuve produits par celles-ci ; qu'ayant pu déduire de ses constatations l'absence de caractérisation du harcèlement moral allégué, elle a, sans modifier l'objet du litige, légalement justifié sa décision ;
Sur le pourvoi principal de l'employeur ci-après annexé :
Attendu qu'ayant exactement retenu qu'il incombait à l'employeur et non au médecin du travail, dont les réponses n'avaient été que d'ordre général, de justifier du respect de l'obligation de reclassement, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutation ou transformation du poste de travail, la cour d'appel, qui a relevé qu'en dépit de la possibilité de reclassement qu'offrait une société du groupe, aucune proposition n'avait été faite à la salariée, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS
REJETTE les pourvois principal et incident ;
Laisse à chacune des parties la charge des dépens afférents à son pourvoi ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mars deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Siemens (demanderesse au pourvoi principal).
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que le licenciement de Madame X... ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse et d'AVOIR, en conséquence, condamné la société SIEMENS à lui payer la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement injustifié, outre les frais irrépétibles ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE «Madame X... fait valoir subsidiairement que l'employeur n'a pas respecté l'obligation de reclassement qui lui incombe en application de l'article L.1226-2 du Code du travail ; que par avis du médecin du travail du 23 mai 2007, donné dans le cadre du second examen médical, Madame X... a été déclarée «inapte à tous les postes dans l'entreprise ; apte au même poste dans une autre entreprise » ; que sollicité par l'employeur, par courriers en date du 30 mai 2007 et 12 juin 2007, soit pour formuler des orientations de reclassement soit pour préciser si des propositions de reclassement pouvaient être faites dans l'entreprise ou le groupe pour tenir d'autres postes ou si des postes pouvaient être proposés dans des sociétés en liens opérationnels avec Siemens, le médecin du travail a répondu par courriers des 4 et 18 juin qu'il lui était impossible de faire des propositions de postes que ce soit dans l'entreprise, dans le groupe ou pour les sociétés en liens opérationnels ; qu'il résulte de la lettre de licenciement que l'employeur a estimé, au vu de ces échanges de courriers, avoir rempli son obligation de reclassement ; que toutefois les recherches d'un poste adapté ne pesant pas sur le médecin du travail il incombe à l'employeur de justifier qu'il a entrepris des recherches de reclassement au besoin par la mise en oeuvre de mesures de mutation ou de transformation du poste de travail, les réponses d'ordre général reçues de la médecine du travail ne pouvant le décharger de son obligation ; qu'il est établi que malgré les possibilités de reclassement qu'offrait une société, filiale du groupe SIEMENS, aucune proposition n'a été faite à Madame X... ; que le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a déclaré le licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le préjudice subi par Madame X... sera néanmoins plus exactement réparé en lui allouant la somme de 30.000 € à titre de dommages-intérêts » ;
ET AUX MOTIFS, À LES SUPPOSER TACITEMENT ADOPTÉS DES PREMIERS JUGES QU' « en application de l'article L.1226-2 du Code du travail, lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail, consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités ; que cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise ; que l'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail ; que selon la jurisprudence, si l'avis du médecin conclut à l'inaptitude du salarié à tout emploi dans l'entreprise et à l'impossibilité de son reclassement dans l'entreprise, l'employeur n'est pas dispensé de rechercher une possibilité de reclassement au sein de l'entreprise et, le cas échéant, au sein du groupe auquel elle appartient, au besoin, par la mise en oeuvre de toutes mesures telles que mutations, transformations de poste ou aménagement du temps de travail (Cass. Soc. 3 mars 2003, n°01-44.695 ; Cass. Soc. 10 mars 2004, n°03-42.744 ; Cass. Soc. 21 septembre 2005, n°03-45.988) ; qu'ainsi l'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise ne signifie pas l'inaptitude au travail ; que le licenciement de Madame Françoise X... ne devait être envisagé par la société SIEMENS qu'après une étude sur les adaptations et transformations de son poste de travail ou sur un aménagement de son temps de travail ; que cette recherche de reclassement devait s'étendre à l'ensemble des activités de l'entreprise et au sein du groupe auquel elle appartient ; que suite à ses demandes, la société SIEMENS a bien pris en compte l'avis du médecin du travail (Docteur Z...) sur son impossibilité de faire des propositions de poste dans l'entreprise, dans le groupe, y compris dans les sociétés en liens opérationnels pour permettre le reclassement de Madame X... et pour prendre sa décision ; mais qu'en se retranchant derrière l'avis du médecin du travail pour justifier son impossibilité de reclasser la demanderesse, la société SIEMENS a manqué à son obligation de reclassement ; que selon la jurisprudence, c'est à l'employeur d'apporter la preuve de l'impossibilité où il se trouve de reclasser le salarié ; que la sanction de la violation de l'obligation de reclassement ne peut donner lieu qu'au versement d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. Soc. 5 décembre 1995) ; que le Conseil estime que l'employeur n'apporte pas la preuve d'une recherche de reclassement de Madame Françoise X... au sein du groupe international SIEMENS (groupe de plusieurs centaines de milliers de salariés) et constate l'absence de proposition concrète, précise et consistante de reclassement de la demanderesse ; qu'en l'absence d'origine professionnelle de l'inaptitude de Madame Françoise X..., il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article L.1226-15 du code du travail ; que dans ces conditions, le Conseil alloue à Madame Françoise X... une somme de 16.000 € au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse » ;
ALORS QUE l'employeur est tenu, en vertu de l'obligation de sécurité de résultat qui pèse sur lui, de respecter les avis émis par le médecin du travail sur la santé de ses salariés ; qu'il ne peut donc, dans le cadre de la recherche de reclassement du salarié déclaré inapte à son poste, méconnaître les contreindications prescrites par le médecin du travail ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations des juges du fond qu'après avoir déclaré Madame X... inapte à tout poste dans l'entreprise, le médecin du travail a précisé à deux reprises à la Société SIEMENS que, compte tenu de l'état de santé de la salariée, aucune proposition de poste n'était envisageable dans l'entreprise, le groupe auquel elle appartient et même les sociétés en liens opérationnels avec elle ; que cette position formulée en des termes aussi généraux qu'impératifs s'imposait à la Société SIEMENS et faisait objectivement obstacle à la recherche de postes éventuellement disponibles au sein du groupe auquel appartient cette dernière ; qu'en décidant que, nonobstant ces avis du médecin du travail, la Société SIEMENS aurait été tenue d'accomplir des recherches de reclassement et de formuler des propositions nécessairement incompatibles avec l'état de santé de la salariée, la cour d'appel a violé les articles L.1226-2 et L.4121-1 du Code du travail.
Moyen produit par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour Mme X... (demanderesse au pourvoi incident).
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé le jugement en ce qu'il a débouté Madame X... de sa demande de nullité du licenciement au titre du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS QU'« il résulte des éléments produits par Madame X... et non contestés par l'employeur qu'à la suite d'une réorganisation des services en septembre 2004, liée à l'intégration à une division du groupe SIEMENS, plusieurs missions qui étaient attachées à son poste de responsable administration des ventes lui ont été retirées et qu'un poste de responsable opérationnel de l'administration des ventes et de la gestion administrative du site a été créé ; que ce poste a été confié en décembre 2004 à l'assistante du directeur régional, Marjorie A... ; qu'il résulte des éléments médicaux produits que les arrêts de travail qui se sont succédés de juin 2005 à avril 2007 résultent d'un état dépressif réactionnel à des problèmes d'environnement professionnel ; que, toutefois, s'agissant des faits permettant de présumer l'existence d'un harcèlement, Madame X... ne produit que des témoignages d'amis ou de proches, extérieurs à l'entreprise, se faisant l'écho de son mal être au travail et de situations vécues comme conflictuelles ; que les mails qu'elle produit ne sont nullement démonstratifs d'attitude humiliante ou vexatoire de la part de sa direction ; qu'elle apparaît avoir été normalement conviée aux différentes réunions destinées à informer les salariés des changements d'organisation, étant précisé que pour d'autres réunions elle était en arrêt de travail ; qu'elle n'apporte pas plus d'éléments au soutien d'attitudes destinées à la marginaliser, la transcription qu'elle donne de l'entretien préalable à son licenciement et des doléances dont elle a fait alors part à la directrice des ressources humaines, ne pouvant être que la traduction de sa propre vision d'une situation vécue comme "une mise au placard" ; qu'il résulte des documents produits par l'employeur que le "recentrage des tâches" a rejailli sur l'ensemble des postes de la direction à laquelle Madame X... appartenait, et qu'elle n'a pas été plus que d'autres reléguée à des fonctions ne relevant pas de sa qualification telles que la prise du standard téléphonique en cas d'absence du titulaire ; qu'il en résulte que l'état dépressif et l'état d'inaptitude professionnelle en ayant résulté, s'ils sont liés à la modification, concomitante à la réorganisation des services de l'entreprise du poste de Madame X... et, notamment à la suppression de certaines tâches qui lui étaient confiées précédemment et à la création d'un poste hiérarchiquement supérieur ne peuvent être reliés à des agissements laissant présumer l'existence d'un harcèlement moral ; que Madame X... sera en conséquence déboutée de sa demande fondée sur la nullité du licenciement » ;
1°) ALORS QUE lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge d'apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et, dans l'affirmative, il incombe à l'employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu'en jugeant, pour débouter Madame X... de sa demande de nullité du licenciement, qu'elle n'apportait aucun élément probant de nature à caractériser un harcèlement moral cependant qu'il résultait de ses propres constatations que plusieurs missions auparavant attachées au poste de responsable administration des ventes de Madame X... lui avaient été retirées, qu'un poste de responsable opérationnel de l'administration des ventes et de la gestion administrative du site avait concomitamment été créé et confié à une autre personne et que les certificats médicaux produits établissaient que les arrêts de travail de Madame X... résultaient d'un état dépressif réactionnel à des problèmes d'environnement professionnel, tous éléments de nature à faire présumer d'un harcèlement moral, la Cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les articles L. 1154-1 et L. 1152-1 du Code du travail ;
2°) ALORS QU'en rejetant la demande en nullité du licenciement fondée sur le harcèlement moral subi par Madame X..., motif pris qu'elle ne produit que des témoignages d'amis ou de proches, extérieurs à l'entreprise, se faisant l'écho de son mal être au travail et de situations vécues comme conflictuelles, tandis que l'extériorité à l'entreprise de ces témoignages ne les privait pas de leur pertinence au titre d'éléments permettant de présumer l'existence d'un harcèlement moral, la Cour d'appel a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du travail ;
3°) ALORS QUE les juges doivent examiner l'intégralité des faits avancés par le salarié et rechercher si l'ensemble des éléments établis par le salarié ne sont pas de nature à faire présumer un harcèlement moral ; qu'en ne se prononçant pas sur le fait, invoqué par Madame X..., que le déclassement subi avait eu des conséquences sur sa rémunération qui, pour la première fois depuis son entrée dans la société, n'avait pas bénéficié, en 2005, d'une réévaluation annuelle, la Cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur l'intégralité des faits avancés par le salarié et n'a pas recherché s'ils étaient de nature à faire présumer un harcèlement moral, n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du Code du Travail ;
4°) ALORS QUE le juge ne peut modifier l'objet du litige tel qu'il est déterminé par les prétentions des parties ; que Madame X... se prévalait devant la Cour d'appel du compte rendu de son entretien préalable au licenciement, établi par Madame Y..., salariée de l'entreprise l'ayant assistée, au soutien du fait que la directrice des ressources humaines avait elle-même reconnu qu'elle était marginalisée ; qu'en considérant, pour les écarter, que les éléments au soutien de l'existence d'une marginalisation émanait de la transcription que Madame X... faisait elle-même de l'entretien, quand il n'était pas contesté que la transcription produite émanait de la salariée l'ayant assistée, la Cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation des articles 4 et 5 du Code de procédure civile.
ECLI:FR:CCASS:2013:SO00564
Analyse
Décision attaquée : Cour d'appel de Caen , du 28 octobre 2011
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