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HARCELEMENT MORAL:
Il appartient au seul employeur de prouver que les éléments objectifs étrangers à tout harcèlement justifiaient les mesures spécifiques à l'encontre du salarié
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que les faits invoqués par le salarié étaient avérés et que si certains étaient objectivement justifiés, il n'existait pas d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement justifiant les refus de congés successivement opposés à M. X..., les courriers impératifs adressés au salarié d'avoir à reprendre son poste d'afficheur monteur à compter du 14 septembre 2007, son rattachement à compter du mois de novembre 2007 à l'agence de Lagny, la procédure de licenciement engagée à son encontre le 14 décembre 2007 pour la faute commise le 13 décembre 2007 et la modification du mode de calcul de sa rémunération à compter de mars 2008, au mépris des engagements pris ; qu'elle a ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;
DISCRIMINATION SOCIALE
Même charge de la preuve sur l'employeur
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que les faits invoqués par le salarié étaient avérés et que si certains étaient objectivement justifiés, il n'existait pas d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement justifiant les refus de congés successivement opposés à M. X..., les courriers impératifs adressés au salarié d'avoir à reprendre son poste d'afficheur monteur à compter du 14 septembre 2007, son rattachement à compter du mois de novembre 2007 à l'agence de Lagny, la procédure de licenciement engagée à son encontre le 14 décembre 2007 pour la faute commise le 13 décembre 2007 et la modification du mode de calcul de sa rémunération à compter de mars 2008, au mépris des engagements pris ; qu'elle a ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision
INSULTES ENVERS LA DIRECTION
Cette fois, la cour de cassation estime qu'il tenir compte du contexte de tension sociale pour réduire le licenciement à un licenciement pour cause réelle et sérieuse, et non pour faute grave, privative du préavis et de l'indemnité de licenciement, d'un salarié ayant 20 ans d'ancienneté
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés, que le salarié, qui comptait vingt ans d'ancienneté dans l'entreprise, avait tenu, au cours de la réunion du comité d'entreprise du 16 avril 2009, les propos qui lui étaient reprochés dans un contexte de vive tension opposant les représentants du personnel et la direction ; qu'elle a pu en déduire que ce comportement ne rendait pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, et ne constituait pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé
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Cour de cassation -chambre sociale
Audience publique du mercredi 27 février 2013
N° de pourvoi: 11-27474 --------------Non publié au bulletin ---------------------Rejet
M. Béraud (conseiller le plus ancien faisant fonction de président), président
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat(s)
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 12 octobre 2011), que M. X... a été engagé à compter du 3 avril 1989 par la société Dauphin communication, aux droits de laquelle se trouve la société Clear Channel France, en qualité d'afficheur monteur et affecté à la succursale de Lagny ; qu'élu membre titulaire du comité d'entreprise lors des élections professionnelles de 2003, il a été désigné secrétaire de cette institution et du comité de groupe ; que par lettre du 23 septembre 2003, l'employeur l'a dispensé de son activité professionnelle en raison de ses fonctions de secrétaire du comité d'entreprise, avec maintien de son salaire brut ; qu'il a été rattaché à la direction des ressources humaines de l'entreprise ; que réélu lors des élections de novembre 2005, il a été à nouveau désigné aux fonctions de secrétaire du comité d'entreprise, qu'il a continué à exercer dans les mêmes conditions ; que par lettre du 15 septembre 2006, l'employeur a confirmé " avec effet rétroactif du 1er janvier 2006, " en raison de son statut spécial au sein du comité d'entreprise, son forfait " autres heures " ; qu'en 2007, l'employeur a dénoncé les usages relatifs au traitement et à la prise des heures de délégation, après information et consultation du comité d'entreprise au cours de sa réunion du 9 mai 2007 ; que par lettre du 30 août 2007, l'employeur a indiqué à M. X... qu'il devait reprendre dès le 14 septembre 2007 son activité d'afficheur monteur à l'agence de Lagny, son affectation d'origine, qu'il ne bénéficierait plus d'un forfait de 151, 67 heures, mais serait rémunéré conformément aux textes en vigueur et qu'il devrait en conséquence établir, tous les mois, une feuille de déclaration de ses heures de délégation dans la limite d'un crédit de 20 heures ; que le 15 juillet 2007, M. X... a saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation de la société à lui payer un rappel de salaire et des dommages-intérêts pour l'avoir abusivement empêché de prendre ses congés payés, pour harcèlement moral et pour discrimination syndicale ; qu'après avoir obtenu l'autorisation de l'inspecteur du travail, l'employeur l'a licencié pour faute grave, le 23 juillet 2009, pour avoir tenu au cours d'une réunion du comité d'entreprise des propos injurieux à l'égard du directeur des ressources humaines ; que M. X... a formé dans l'instance en cours devant la juridiction prud'homale des demandes au titre de ce licenciement ;
Sur le premier et le deuxième moyens :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces moyens qui ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner à payer au salarié des sommes à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, d'indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, alors, selon le moyen :
1°/ que si les usages en vigueur dans certains milieux professionnels peuvent, jusqu'à un certain point, expliquer les écarts de langages d'un salarié, ils ne sauraient en tout état de cause excuser des insultes répétées qui sont proférées, dans le cadre du comité d'entreprise et en présence d'autres salariés, par un salarié investi de fonctions représentatives à l'encontre d'un représentant de l'employeur ; que de tels abus répétés de la liberté d'expression constituent une faute grave, sans que le juge ne puisse les justifier par le tempérament du salarié, ni par le contexte de tension inhérent aux discussions qui ont cours dans le cadre d'institutions représentatives du personnel ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a expressément relevé que le salarié, déjà sanctionné par deux avertissements des 30 octobre 2006 et 23 janvier 2007 pour avoir abusé de sa liberté d'expression au détriment de la direction de l'entreprise (faits visés par la lettre de licenciement du 23 juillet 2009), avait employé des termes grossiers et insultants à l'encontre du représentant de l'employeur lors de la réunion extraordinaire du comité d'entreprise en date du 16 avril 2009 : « vous êtes un trou du cul, vous ! » ; qu'elle a encore relevé que le salarié s'était de nouveau adressé à M. Z... lors de la réunion mensuelle du 30 avril 2009 en usant de termes tout aussi insultants : « là, M. Z... est sur le perchoir, comme un vautour qui se dit : avec cela, je vais le niquer, je vais lui faire son cul » ; qu'enfin, la cour d'appel a rappelé que l'inspecteur du travail et le ministre du travail avaient stigmatisé un « comportement récurrent » du salarié et délivré l'autorisation de licenciement ; qu'en retenant que ces insultes répétées ne constituaient pas une faute grave compte tenu à la fois du langage en usage dans le milieu professionnel et du tempérament « primaire » du salarié, et du contexte de vives tensions qui se manifestaient dans les réunions du comité d'entreprise, lorsqu'elle avait au demeurant elle-même relevé que les autres membres du comité d'entreprise savaient, pour leur part, maîtriser « un niveau de langage permettant d'attaquer l'adversaire à fleurets mouchetés », la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
2°/ que la cour d'appel a expressément admis que les propos litigieux ne présentaient « pas de lien direct » avec les mesures dont le salarié se plaignait par ailleurs ; qu'en affirmant néanmoins qu'il ne pouvait être « fait abstraction » de la dégradation des conditions de travail qu'il alléguait, pour excuser la gravité des propos litigieux, lorsque la gravité des insultes répétées ne pouvait être minorée par un contexte extérieur aux réunions au cours desquelles elles avaient été proférées, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
3°/ que l'éventuel soutien apporté par les salariés de l'entreprise au salarié qui a abusé de sa liberté d'expression ne saurait en aucune façon excuser la gravité de la faute commise ; qu'en se fondant sur le soutien « massif » des autres syndicats pour excuser les abus répétés de la liberté d'expression, la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
4°/ qu'un délai de trois semaines entre la commission du dernier fait reproché au salarié et l'engagement de la procédure de licenciement n'a pas d'incidence sur la qualification de faute grave ; qu'en relevant que l'employeur n'avait engagé la procédure de licenciement que « près de trois semaines plus tard », la cour d'appel a violé l'article L. 1234-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel a constaté, par motifs adoptés, que le salarié, qui comptait vingt ans d'ancienneté dans l'entreprise, avait tenu, au cours de la réunion du comité d'entreprise du 16 avril 2009, les propos qui lui étaient reprochés dans un contexte de vive tension opposant les représentants du personnel et la direction ; qu'elle a pu en déduire que ce comportement ne rendait pas impossible le maintien du salarié dans l'entreprise, et ne constituait pas une faute grave ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, alors, selon le moyen :
1°/ que ne commet aucun agissement de harcèlement moral l'employeur qui se borne à refuser, pour des raisons tenant à la bonne organisation de ses services, la date proposée par un salarié pour son départ en congés ; qu'en l'espèce, à l'appui de sa décision, la cour d'appel a reproché à la société Clear Channel de ne produire aucun « élément objectif étranger à tout harcèlement justifiant les refus de congés successivement opposés au salarié » ; que la cassation à intervenir sur les dispositions ayant dit que l'employeur avait méconnu le droit aux congés du salarié entraînera, par application de l'article 624 du code de procédure civile, la censure des dispositions retenant l'existence d'agissements de harcèlement moral ;
2°/ que ne commet aucun agissement de harcèlement moral l'employeur qui, après avoir régulièrement dénoncé l'usage attribuant au salarié protégé une dispense de toute activité professionnelle et arrêtant un calcul particulier de ses heures de délégation, lui donne instruction de rejoindre son poste d'origine et recalcule la rémunération conformément aux stipulations initiales du contrat ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu, au titre de prétendus faits de harcèlement moral, que l'employeur avait méconnu l'engagement unilatéral dont bénéficiait le salarié en modifiant le mode de calcul de sa rémunération et en lui adressant l'ordre de reprendre son poste d'afficheur monteur ; que la cassation à intervenir sur les dispositions ayant dit que l'employeur n'avait pas régulièrement dénoncé l'usage litigieux entraînera, par application de l'article 624 du code de procédure civile, celle des dispositions ayant condamné la société Clear Channel pour harcèlement moral ;
3°/ que le juge judiciaire ne saurait se fonder sur le seul fait que l'inspecteur du travail avait refusé d'accorder l'autorisation de licenciement en raison d'un supposé lien entre les mandats exercés et la mesure envisagée pour imputer à l'employeur des agissements répétés de harcèlement moral ; qu'il appartient au juge de porter sa propre appréciation sur les faits soumis à son examen ; qu'en se référant aux motifs retenus par l'inspecteur du travail pour refuser d'accorder l'autorisation de licenciement sollicitée en 2007 (décision notifiée le 14 mars 2008), lorsqu'il résultait au demeurant de ses propres constatations que le grief adressé au salarié par l'employeur (à savoir « l'utilisation inappropriée de la messagerie interne de l'entreprise le 13 décembre 2007 » pour la diffusion de tracts syndicaux critiquant la direction de l'entreprise) était établi, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
4°/ que le seul contexte de tensions existant entre un salarié protégé et son employeur ne saurait conférer à l'engagement d'une procédure disciplinaire le caractère d'un agissement constitutif de harcèlement moral ; qu'à supposer qu'elle ait affirmé, par adoption des motifs des premiers juges, que le contexte particulier dans lequel avait été engagée la procédure disciplinaire pouvait faire présumer qu'elle n'était pas « dépourvue de lien » avec les autres mesures litigieuses, la cour d'appel a violé l'article L. 1152-1 du code du travail ;
5°/ que le juge ne saurait prononcer une condamnation pour harcèlement moral sur le seul fondement d'un état dépressif du salarié, un tel état de santé n'étant pas nécessairement imputable à des agissements de l'employeur ou de membres de l'entreprise ; qu'en se bornant à relever que le salarié avait été en arrêté pour syndrome anxio-dépressif, lorsqu'elle n'avait caractérisé aucun agissement de l'employeur à l'origine de cet état, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1152-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel, appréciant souverainement la valeur et la portée des éléments de preuve qui lui étaient soumis, a retenu que les faits invoqués par le salarié étaient avérés et que si certains étaient objectivement justifiés, il n'existait pas d'éléments objectifs étrangers à tout harcèlement justifiant les refus de congés successivement opposés à M. X..., les courriers impératifs adressés au salarié d'avoir à reprendre son poste d'afficheur monteur à compter du 14 septembre 2007, son rattachement à compter du mois de novembre 2007 à l'agence de Lagny, la procédure de licenciement engagée à son encontre le 14 décembre 2007 pour la faute commise le 13 décembre 2007 et la modification du mode de calcul de sa rémunération à compter de mars 2008, au mépris des engagements pris ; qu'elle a ainsi, sans encourir les griefs du moyen, légalement justifié sa décision ;
Et sur le cinquième moyen :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de la condamner au paiement de dommages-intérêts pour discrimination syndicale, alors, selon le moyen :
1°/ que pour condamner la société Clear Channel au titre d'une prétendue discrimination syndicale, la cour d'appel s'est bornée à retenir que le harcèlement moral qu'elle imputait à la société Clear Channel « participe d'une discrimination syndicale » ; que la cassation à intervenir sur les dispositions ayant condamné la société Clear Channel au titre de prétendus faits de harcèlement moral entraînera, par application de l'article 624 du code de procédure civile, celles des dispositions ayant condamné la société Clean Channel au titre d'une discrimination syndicale ;
2°/ que la discrimination syndicale résulte d'actes ou de comportements de l'employeur infligés à un salarié en raison de son appartenance syndicale ; que le juge ne saurait donc l'inférer du seul fait qu'il a imputé à l'employeur des agissements de harcèlement moral, sans relever par ailleurs que le salarié aurait subi un traitement fondé sur ses activités syndicales ; qu'en l'espèce, la société Clear Channel rappelait qu'elle avait appliqué le même traitement à tous les salariés puisqu'elle n'avait pas dénoncé le seul engagement unilatéral applicable à M. X..., mais l'ensemble des « usages en vigueur au sein de l'entreprise, relatifs au traitement et à la prise des heures de délégation (...) » (lettre de dénonciation du 6 juillet 2007) ; qu'en affirmant péremptoirement que « le harcèlement moral (...) participe d'une discrimination syndicale », lorsqu'elle n'avait nullement caractérisé un traitement fondé sur un critère discriminatoire, la cour d'appel a violé l'article L. 1134-1 du code du travail ;
Mais attendu que la cour d'appel qui a constaté que la remise en cause de la dispense d'activité du salarié, son rattachement à l'établissement de Lagny et la modification unilatérale de sa rémunération étaient établis et que ces faits, laissant présumer l'existence d'une discrimination en lien avec son activité syndicale, n'étaient pas justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Clear Channel France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Clear Channel France et la condamne à payer à M. X... et au syndicat Flag la somme globale de 2 500 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept février deux mille treize.
Analyse
Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles , du 12 octobre 2011
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