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Le respect de la vie privée à ses limites.
Les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels
La cour de Cassation vient d'apporter une nouvelle lumière sur la possibilité pour l'employeur d'accéder au contenu des fichiers des salariés sur les ordinateurs mis à leur disposition, hors la présence des salariés concernés.
Tout réside dans l'intitulé du fichier.
Il a été dans cette décision du 10 mai 2012, reproduite ci-après, que la seule dénomination "Mes documents" donnée à un fichier ne lui confère pas un caractère personnel.
En conséquence, l'employeur ne porte pas atteinte à la vie privée du salarié en ouvrant ce fichier par huissier, hors la présence du salarié, contrairement à ce qu'avaient estimé les 1ers juges.
Je vous invite à lire après l'arrêt l'intéressante analyse publiée sur le site de la cour de cassation sur ce sujet
1) Cour de cassation - chambre sociale
Audience publique du jeudi 10 mai 2012
N° de pourvoi: 11-13884 -------------------Publié au bulletin------------------- Cassation partielle
M. Bailly (conseiller doyen faisant fonction de président), président
Mme Grivel, conseiller rapporteur
M. Weissmann, avocat général
SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Masse-Dessen et Thouvenin, avocat(s)
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AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 9 du code civil et 9 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X..., qui avait été engagé le 1er septembre 1998 en qualité d'attaché technico-commercial par la société Nouvelle communication téléphonique, a été licencié pour faute grave le 11 septembre 2006 pour avoir fait une utilisation détournée de son ordinateur professionnel en enregistrant des photos à caractère pornographique et des vidéos de salariés prises contre leur volonté ;
Attendu que pour décider que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse et condamner l'employeur au paiement de diverses indemnités à ce titre, l'arrêt énonce que, selon le constat d'huissier, les fichiers incriminés se trouvaient sur le disque dur de l'ordinateur du salarié dans un dossier intitulé "Mes documents" et que dès lors que leur ouverture faite hors la présence de l'intéressé n'était justifiée par aucun risque ou événement particulier justifiant l'atteinte portée à sa vie privée, leur découverte ne pouvait justifier le licenciement ;
Attendu, cependant, que les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels ;
Qu'en statuant comme elle a fait, alors que la seule dénomination "Mes documents" donnée à un fichier ne lui confère pas un caractère personnel, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qui concerne ses dispositions relatives aux rappels d'heures supplémentaires et congés payés afférents, l'arrêt rendu le 11 janvier 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Nîmes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
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Lien vers le site de la cour de cassation - analyse des arrêts de la chambre social
http://www.courdecassation.fr/publications_cour_26/bulletin_droit_travai...
2) Respect de la vie personnelle du salarié
Sommaire
Les fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition par l'employeur pour les besoins de son travail sont présumés avoir un caractère professionnel, en sorte que l'employeur est en droit de les ouvrir hors la présence de l'intéressé, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels.
Et la seule dénomination "mes documents" donnée à un fichier ne lui conférant pas un caractère personnel, la cour d'appel qui a jugé qu'il ne pouvait être ouvert en dehors de la présence du salarié a violé les articles 9 du code civil et 9 du code de procédure civile.
Soc., 10 mai 2012
CASSATION PARTIELLE
Arrêt n° 1203 F - P+B
Recours contre N° 11-13.884 - CA Nîmes, 11 janvier 2011
M. Bailly, f. f. Pt. - Mme Grivel, Rap. - M. Weissmann, Av. Gén.
Note
Un salarié a été licencié pour faute grave à la suite de l'utilisation détournée du matériel informatique mis à sa disposition par son employeur en enregistrant des photos à caractère pornographique et des vidéos des salariés prises contre leur volonté.
Après avoir relevé que les fichiers incriminés se trouvaient sur le disque dur de l'ordinateur du salarié dans un dossier intitulé « Mes documents » et que dès lors leur ouverture faite hors la présence de l'intéressé n'était justifiée par aucun risque ou évènement particulier justifiant l'atteinte portée à sa vie privée, la cour d'appel a, par arrêt confirmatif, décidé que le licenciement était sans cause réelle et sérieuse.
Ce pourvoi était ainsi l'occasion pour la chambre sociale de trancher une nouvelle fois un litige relatif au contrôle par l'employeur des fichiers créés par le salarié à l'aide de l'outil informatique mis à sa disposition pour les besoins de son travail.
Dans un arrêt du 17 mai 2005 (pourvoi n° 03-40.017, Bull. 2005, V, n°165), la chambre sociale avait précisé les conditions dans lesquelles l'employeur peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme personnels contenus sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition. Elle a décidé que « Sauf risque ou événement particulier, l'employeur ne peut ouvrir les fichiers identifiés par le salarié comme personnels contenus sur le disque dur de l'ordinateur mis à sa disposition qu'en présence de ce dernier ou celui-ci dûment appelé. »
La chambre sociale a ensuite posé une présomption du caractère professionnel des fichiers électroniques : « les dossiers et fichiers créés par un salarié grâce à l'outil informatique mis à sa disposition par son employeur pour l'exécution de son travail sont présumés, sauf si le salarié les identifie comme étant personnels, avoir un caractère professionnel de sorte que l'employeur peut y avoir accès hors sa présence. » (Soc., 18 octobre 2006, pourvoi n° 04-48.025, Bull. 2006, V, n° 308).
Elle a aussi jugé que :
Viole les articles 9 du code civil et 9 du code de procédure civile la cour d'appel qui considère qu'un répertoire intitulé JM ne peut être ouvert en l'absence du salarié au motif que ces initiales correspondraient à celles du prénom du salarié, alors qu'il ne résulte pas de ces seules constatations qu'il était identifié comme personnel. (Soc., 21 octobre 2009, pourvoi n° 07-43.877, Bull. 2009, V, n° 226)
« la cour d'appel, qui a constaté que les fichiers ouverts par l'employeur étaient intitulés "essais divers, essais divers B, essais divers restaurés", en a justement déduit que ceux-ci n'ayant pas un caractère personnel, l'employeur était en droit de les ouvrir hors de la présence de l'intéressé. » (Soc., 15 décembre 2009, pourvoi n° 07-44.264, Bull. 2009, V, n°284)
Il en résulte que l'identification par le salarié d'un fichier comme personnel doit résulter de son intitulé et non de son contenu. Ses seules initiales ne suffisent pas à identifier un fichier comme personnel
Par le présent arrêt, la chambre sociale a décidé que l'appellation « Mes documents », que l'on trouve sur la plupart des ordinateurs, ne pouvait pas révéler une volonté de conférer aux fichiers un caractère personnel.
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