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« Une clause de non-concurrence n'est licite que si :
- elle est indispensable aux intérêts légitimes de l'entreprise,
- limitée dans le temps et dans l'espace,
- qu'elle tient compte des spécificités de l'emploi du salarié
- et comporte l'obligation pour l'employeur de verser au salarié une contrepartie financière
Ces conditions étant cumulatives.
La contrepartie financière est due quel que soit le motif de la rupture, même si le salarié a retrouvé un emploi immédiatement après avoir démissionné, à moins que l'employeur ait libéré le salarié de l'obligation dans les délais et les formes prescrites. Enfin, le montant de la contrepartie financière doit respecter le principe de proportionnalité. Il s'ensuit dès lors qu'une contrepartie financière dérisoire équivaut à une absence de contrepartie"
Dans une affaire jugée par la Cour d'appel de PARIS le 25 novembre 2010, pour considérer que la contrepartie financière versée à Monsieur X... était dérisoire et dire qu'elle aurait dû être fixée à la somme de 121.700 ?, le juge de la Cour d'appel a affirmé que « les contreparties financières de clause de non-concurrence correspondent en général au minimum à 33 % de la rémunération mensuelle brute sur les 12 derniers mois de l'année » ;
L'employeur a formé un pourvoi en indiquant que :
"Le caractère dérisoire de la contrepartie financière entraîne la nullité de la clause de non-concurrence ;
que, dans une telle hypothèse, le juge prud'homal peut uniquement allouer au salarié des dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par l'exécution d'une clause de non-concurrence illicite et n'est en aucun cas autorisé à fixer lui-même le montant de la contrepartie financière à la place des parties ;
qu'en estimant que « les contreparties financières de clause de non-concurrence correspondent en général au minimum à 33 % de la rémunération mensuelle brute sur les 12 derniers mois de l'année » et en fixant le montant de la contrepartie financière due à Monsieur X... à la somme de 121.700 ?, afin d'évaluer le montant des dommages-intérêts dus à Monsieur X..., la Cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du Code du travail et 1147 du Code civil ;
QU'en cas de nullité de la clause de non-concurrence, l'employeur doit verser au salarié des dommages-intérêts correspondant au préjudice subi du fait de l'exécution d'une clause de non-concurrence illicite ; que ce préjudice s'apprécie au regard de l'atteinte à la liberté d'exercer une activité professionnelle du salarié et de la diminution de ses possibilités de retrouver un emploi correspondant à sa formation et à son expérience professionnelle ;
qu'au cas présent, il était exposé, d'une part, que le champ professionnel de l'obligation de non-concurrence de Monsieur X... était très limité et, d'autre part, que Monsieur X... avait pu immédiatement après son départ de la société TSAF conclure un contrat de travail au sein d'une société bancaire opérant sur les marchés et percevoir ainsi une rémunération mensuelle fixe de 8.333,33 ? ; qu'en refusant de prendre en compte de ces éléments déterminants qui lui étaient présentés par l'exposante dans ses conclusions, la Cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 1121-1 du Code du travail et 1147 du Code civil ainsi que du principe de la réparation intégrale du préjudice.
La cour de cassation lui donne raison dans cet arrêt, au motif que :
Si une contrepartie dérisoire à la clause de non-concurrence équivaut à une absence de contrepartie financière rendant la clause nulle, le juge ne peut, sous couvert de l'appréciation du caractère dérisoire de la contrepartie pécuniaire invoquée par le salarié, substituer son appréciation du montant de cette contrepartie à celle fixée par les parties et, après avoir décidé de l'annulation de la clause, accorder au salarié la contrepartie qu'il estime justifiée
Précédents jurisprudentiels : Sur l'illicéité d'une clause de non-concurrence comportant une contrepartie financière dérisoire, dans le même sens que : Soc., 15 novembre 2006, pourvoi n° 04-46.721, Bull. 2006, V, n° 341 (1) (rejet),
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Cour de cassation - chambre sociale
Audience publique du mercredi 16 mai 2012
N° de pourvoi: 11-10760 --------------Publié au bulletin -----------Cassation
Mme Mazars (conseiller doyen faisant fonction de président), président
Mme Goasguen, conseiller rapporteur
M. Legoux, avocat général
SCP Boullez, SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat(s)
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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 1131 du code civil et L. 1121-1 du code du travail ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 25 août 2003 par la société Tradition securities and futures (TSAF) en qualité d'opérateur/vendeur, moyennant une rémunération contractuelle composée d'une partie fixe brute annuelle de 100 000 euros et d'une partie variable calculée sur le chiffre d'affaires ; que son contrat comportait une clause de non-concurrence limitée à six mois, portant sur les seules fonctions du salarié, circonscrite géographiquement à Paris, l'Union européenne et la Suisse et assortie d'une contrepartie financière d'un montant mensuel brut égal au salaire fixe de base du dernier mois travaillé ; que le salarié a démissionné le 22 décembre 2006 et a perçu mensuellement pendant six mois une somme de 9 241,46 euros ; qu'ayant en vain réclamé une indemnité de non-concurrence incluant la part variable de sa rémunération, le salarié a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que pour juger la clause de non-concurrence illicite et condamner l'employeur à payer au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient que la contrepartie financière prévue contractuellement et correspondant, pour six mois d'application de l'interdiction, à 1,14 mois sur la base du dernier mois travaillé est disproportionnée et dérisoire ; qu'ajoutant que les contreparties financières de non-concurrence correspondent en général au minimum à 33 % de la rémunération moyenne mensuelle brute sur les douze derniers mois, la cour d'appel a fixé le montant de la contrepartie financière sur cette base puis, prenant en compte la somme déjà perçue à ce titre par le salarié, elle lui a alloué le solde à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la clause illicite ;
Attendu cependant que si une contrepartie financière dérisoire à la clause de non-concurrence équivaut à une absence de contrepartie rendant la clause nulle, le juge ne peut, sous couvert de l'appréciation du caractère dérisoire de la contrepartie pécuniaire invoquée par le salarié, substituer son appréciation du montant de cette contrepartie à celle fixée par les parties et, après avoir décidé de l'annulation de la clause, accorder au salarié la contrepartie qu'il estime justifiée ;
Qu'en statuant comme elle a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 novembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par M. Chollet, conseiller le plus ancien en ayant délibéré, conformément à l'article 456 du code de procédure civile, en l'audience publique du seize mai deux mille douze.
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