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C'est une véritable révolution jurisprudentielle qui a été consacrée par la Cour Administrative d'Appel de Paris dans un arrêt du 18 février 2010.
Saluons à cet égard le courage des magistrats qui ne se sont pas pliés à la volonté de l'Administration.
Saluons aussi la persistance du conducteur qui n'a rien concédé et est allé jusqu'au bout des procédures alors que d'autres auraient abandonné tout effort, de guerre lasse.
Les faits étaient les suivants :
Un conducteur obtient son permis de conduire en 1999.
Il commet diverses infractions qui conduisent à des retraits successifs de points.
En février 2005, celui-ci reçoit un courrier l'informant de l'invalidation de son permis de conduire au motif désormais connu que le solde de ses points est tombé à zéro...
Cet automobiliste saisit le Tribunal Administratif de Versailles d'un recours pour excès de pouvoir afin de faire annuler cette décision en contestant la légalité des retraits de points opérés sur son permis de conduire obtenu en 1999.
Dans l'attente de la décision du Tribunal, celui-ci repasse son permis de conduire au terme du délai d'attente de 6 mois.
Il obtient donc un second permis de conduire en décembre 2005, affecté de 6 points comme tout permis probatoire.
Malheureusement pour lui, il commet de nouvelles infractions entrainant des retraits de points pour un total de 7 points.
En mars 2007, il reçoit donc un nouveau courrier l'informant de l'invalidation de son second permis de conduire au motif que son solde de points est à nouveau tombé à zéro.
Or, en juin 2007, le Tribunal Administratif de Versailles saisi du recours contre la 1ère décision d'invalidation annule celle-ci et réaffecte un total de 7 points au capital du permis de conduire obtenu en 1999.
Conséquence logique : le permis de conduire de 1999 n'était donc pas nul en février 2005.
Le Ministère de l'Intérieur écrit donc à cet automobiliste pour lui demander de choisir entre le 1er permis de conduire (obtenu en 1999) et le 2nd permis (obtenu en décembre 2005).
Cela est logique, car on ne peut avoir deux permis de conduire en même temps : c'est ce qu'on appelle le principe d'unicité du permis de conduire.
Tenu de choisir, le conducteur opte pour le 1er permis (obtenu en 1999), ce qui se comprend dans la mesure où le 2nd venait d'être annulé en mars 2007.
Mais l'administration l'attendait au tournant et décide de retirer de ce permis obtenu en 1999 les points consécutifs aux infractions commises avec le 2nd permis de conduire (obtenu en décembre 2005).
De ce fait, l'administration opère le calcul suivant : 7-7 = 0.
Pour cela, elle retire les 7 points, consécutifs aux infractions commises avec le permis obtenu en décembre 2005, du nombre total de points affectés au 1er permis de conduire et sur lequel le Tribunal Administratif avait précisément réaffecté un solde de 7 points...
Comme les choses s'emboitent parfaitement !
L'administration envoie donc à ce conducteur un nouveau courrier l'informant de l'invalidation de son permis de conduire au motif de la perte totale de ses points.
Celui-ci ne désarme pas et saisit à nouveau le Tribunal Administratif de Versailles afin de contester la légalité de cette nouvelle décision.
En juin 2008, le Tribunal Administratif rejette le recours de cet automobiliste.
Ce dernier fait appel devant la Cour Administrative d'Appel de Versailles.
La question clairement posée en l'espèce était la suivante : combien de points restaient-ils à cet automobiliste ?
Le choix était le suivant :
- soit on considère que celui-ci bénéficiait d'un permis de conduire avec seulement 7 points à savoir ceux qui lui avaient été restitués par le Tribunal Administratif en juin 2007.
Dans ce cas, son solde de points était effectivement nul puisque ce conducteur avait commis depuis décembre 2005 des infractions pour un total de 7 points et dans ce cas 7-7 = 0.
- soit on considère que cet automobiliste bénéficiait d'un total de 12 points (on ne peut pas avoir plus que 12 points sur son permis), à savoir les 7 points réaffectés à son permis obtenu en 1999 et restitués en juin 2007 et 5 des 6 points affectés au permis de conduire obtenu en décembre 2005.
Dans ce cas, le solde de point du permis de conduire de l'automobiliste n'était plus de 0 mais de 5 point (12-7=5)
C'est donc à cette question que devait répondre la Cour.
La Cour commence par rappeler ce que l'on savait déjà, à savoir le principe d'unicité du permis de conduire : on ne peut être titulaire que d'un seul permis de conduire et pas plus !
Dont acte.
Et la Cour Administrative d'Appel pose pour principe que l'on peut cumuler sur son seul permis de conduire les points obtenus sur un second permis de conduire.
Finalement le Ministère de l'Intérieur s'est pris à son propre jeu puisque celui-ci aurait bien voulu retirer sur le 1er permis de conduire de l'intéressé les points affectés sur le second.
Pourquoi pas? Mais alors il faut jouer le jeu jusqu'au bout !
Si l'on permet ainsi de retirer des points sur un seul et même permis, il faut aussi admettre que les points obtenus doivent être crédités sur ce même permis et pas un autre!!!
La seule limite à ce décompte sera le seuil des 12 points.
La loi prévoit en effet que le permis de conduire de chacun est affecté de 12 points : on ne peut aller au delà.
C'est pour cette raison que l'automobiliste a finalement pu repartir avec un capital de 5 points et non 6 points car ses deux permis de conduire (celui de 1999 et celui de 2005) l'ont mené à un total de 12 et non 13 points.
L'intérêt de cette courageuse décision est évident : Si votre permis devient nul et que vous attaquez cette décision devant le Tribunal, si ce dernier vous restitue certains points au terme de cette procédure, ces points s'additionneront avec ceux que vous aurez obtenus entre temps si vous avez décidé de repasser à nouveau le permis au terme du délai d'attente de 6 mois.
Vous repartirez donc avec un permis de conduire au capital renforcé, car vous aurez ainsi non seulement les 6 points issus du nouveau permis de conduire que vous aurez passé, mais en plus les points que le Tribunal aura décidé de vous rendre.
D'où la nécessaire conclusion d'inviter en tout état de cause les justiciables à faire valoir leurs droits.
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