Ecoutes et analyses des données informatiques pour lutter contre le terrorisme
La loi prévoit les différentes méthodes de surveillance que pourront utiliser les services de renseignement : écoutes, géolocalisation, micros, caméras ou logiciels espions, mais également l’utilisation de IMSI-catchers, nom donné à une fausse antenne relais permettant d’intercepter les conversations téléphoniques à proximité.
Autre disposition : la mise en place de « boites noires » chez les fournisseurs d’accès, permettant de relever les données engendrées par le trafic des utilisateurs. Cette technique consisterait non pas à surveiller les communications mais à récolter toutes sortes d’informations, comme l’origine ou le destinataire d’un message, les adresses IP des sites visités, une durée de conversation ou de connexion … Le but étant de détecter une nouvelle « menace terroriste » ou de nouveaux profils de terroristes potentiels, en constatant une « succession suspecte de données de connexion ».
Toujours dans le même but, les services de renseignement pourront mettre en place une surveillance de toutes les personnes en contact avec des personnes déjà suspectées.
La création d'un nouveau fichier, le Fijait
Le projet de loi met aussi en place un Fichier judiciaire national automatisé des auteurs d’infractions terroristes (Fijait). Ce fichier a pour objet de recenser toutes les informations relatives aux personnes ayant été condamnées pour ce type d’infractions. L’inscription dans le Fijait n’est pas automatique, mais fait suite à une décision judiciaire.
Majeurs comme mineurs sont concernés. Seule la durée de conservations des données change : 20 ans pour les majeurs, 10 ans pour les mineurs.
A noter
Ce fichier sera exclu de la compétence de la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL).
Une nouvelle autorité administrative indépendante pour veiller au respect de la loi
Le projet de loi crée une nouvelle autorité administrative indépendante, nommée Commission nationale de contrôle des techniques de renseignement (CNCTR). Cette Commission sera chargée de contrôler les agissements des services de renseignement. A chaque mise en œuvre de ces techniques de surveillance, la Commission doit donner son avis préalable, dans les 24 heures.
Ce contrôle en amont n’est cependant pas applicable dans les cas d’urgence, uniquement soumis à l’autorisation du Premier ministre.
La Commission peut agir a posteriori si elle estime que la législation n’a pas été respectée : elle dispose de pouvoirs d’enquête et peut saisir le Conseil d’Etat.
Tout citoyen, qui pense être surveillé par les services de renseignements, pourra également saisir la Commission.
Bon à savoir
Certaines professions bénéficient d’une protection particulière : journalistes, magistrats, avocats et parlementaires ne pourront pas faire l’objet de procédure d’urgence. Une protection liée au respect du secret professionnel.
A noter
La CNCTR sera composée de 6 magistrats (3 du Conseil d’Etat, 3 de la Cour de cassation) de 6 parlementaires (3 députés, 3 sénateurs, de la majorité comme de l’opposition) et d’un expert en numérique.
La lutte contre le terrorisme ... mais pas seulement
Le projet de loi sur le renseignement définit les missions dans lesquelles les services de renseignement pourront utiliser ces méthodes de surveillance.
La loi indique que ces méthodes pourront notamment être employées dans « la prévention du terrorisme ». Mais également dans les missions suivantes :
- « l’indépendance nationale, l’intégrité du territoire et la défense nationale »,
- « les intérêts majeurs de la politique étrangère »,
- « la prévention des atteintes à la forme républicaines des institutions »,
- « la criminalité et la délinquance organisée »,
- « la défense et la promotion des intérêts économiques, industriels, scientifiques majeurs de la France ».
Des objets de mission larges permettant aux services de renseignement d’agir au-delà de la prévention du terrorisme.
Bon à savoir
Si la loi a été votée par l’Assemblée nationale, elle n’est pas encore adoptée. Le projet de loi sera présenté en juin au Sénat.
Face aux oppositions que suscite la loi, François Hollande s’est également engagé à saisir lui-même le Conseil constitutionnel, pour s’assurer qu’elle est bien conforme à la Constitution.