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Par 3 arrêts du 3 mars 2015, la Cour de cassation admet qu'un licenciement notifié puisse être rétracté par la signature d'une rupture conventionnelle, et qu'un licenciement puisse intervenir à la suite d'une
rupture conventionnelle non aboutie.
Autrement dit, un salarié déjà licencié peut signer ... une rupture conventionnelle qui annule son licenciement ... Et un licenciement peut valablement intervenir après signature d'une rupture conventionnelle rétractée par la suite.
Le contrat de travail d'un directeur était assorti d'une clause de non-concurrence pour une période
de deux ans commençant le jour de la cessation effective du contrat, clause dont le salarié pouvait être libéré soit à tout moment au cours de l'exécution du contrat, soit à l'occasion de sa cessation, au plus tard dans la lettre
notifiant le licenciement ou le jour même de la réception de la démission.
Licencié le 9 janvier 2009, avec dispense d'exécution du préavis de trois mois, l'employeur - qui a oublié de lever la clause de non concurrence dans la lettre de licenciement - propose au salarié une rupture conventionnelle du contrat de travail le 10 février 2009, rupture homologuée par acceptation implicite de la DIRECCTE, le 19 mars 2009.
La date de la cessation effective du contrat fixée par la convention de rupture est le 10 avril, ce qui donne tout le temps nécessaire à l'employeur de lever la clause de non concurrence.
Le 8 avril 2009, l'employeur notifie la levée de la clause de non-concurrence et refuse en conséquence de payer la contrepartie financière de la clause de non-concurrence.
Le salarié saisit alors le conseil de prud'hommes en faisant valoir que la rupture conventionnelle, exclusive du licenciement ou de la démission, ne peut être imposée par l'une ou l'autre des parties. Il estime qu'une rupture
conventionnelle ne peut intervenir après la notification d'un licenciement, conformément à la jurisprudence antérieure selon laquelle " rupture sur rupture ne vaut " et il invoque la levée tardive de l'obligation de non
concurrence.
En application de ce principe (" Rupture sur rupture ne vaut "), la chambre sociale de la Cour de
cassation considère que lorsqu'il existe plusieurs ruptures du contrat, le juge doit toujours examiner l'ordre chronologique : si le motif de la première rupture n'est pas valide, il faudra examiner la seconde rupture, si le motif de la seconde rupture n'est pas retenu, il faudra alors examiner le motif de la
troisième rupture ... Par contre, si le motif de la première rupture est fondé, inutile d'examiner les ruptures suivantes " rupture sur rupture ne vaut".
Dans son arrêt du 3 mars 2015, la cour de cassation affirme que ce principe n'est plus absolu, la deuxième rupture peut donc effacer la première rupture !
Ainsi " lorsque le contrat de travail a été rompu par l'exercice par l'une ou l'autre des parties de son droit de résiliation unilatérale, la signature postérieure d'une rupture conventionnelle vaut renonciation commune à la
rupture précédemment intervenue ".
Une rupture conventionnelle homologuée va pouvoir annuler un licenciement !
" La signature par les parties au contrat de travail d'une rupture conventionnelle, après l'engagement d'une procédure disciplinaire de licenciement, n'emporte pas renonciation par l'employeur à l'exercice de son pouvoir disciplinaire ; qu'il s'ensuit que si le salarié exerce son droit de rétractation de la rupture conventionnelle, l'employeur est fondé à reprendre la procédure disciplinaire par la convocation du salarié à un nouvel entretien préalable dans le respect des dispositions de l'article L. 1332-4 du code du travail et à prononcer une
sanction, y compris un licenciement pour faute grave " (Cass. Soc. 3 mars 2015 n° 13-15.551).
L'employeur, après avoir tenté une rupture conventionnelle peut donc reprendre une procédure de licenciement engagée sur la base de faits fautifs, à condition de respecter le délai de prescription de deux mois.
En l'espèce, l'employeur reprochait à son salarié des absences injustifiées intervenues au mois de juillet et au mois de septembre. Le 28 octobre, les parties décidaient de conclure une rupture conventionnelle, puis le salarié faisait usage son
droit de rétractation, dans le délai de 15 jours calendaires ouvert à compter de la date de signature de la convention de
rupture, précisément le 15 novembre. L'employeur entamait alors une procédure de licenciement.
Le 16 novembre, le salarié était convoqué à un entretien préalable au licenciement et son licenciement lui était notifié le 6 décembre.
Mais la connaissance qu'il avait des faits fautifs remontait à plus de deux mois. Il ne lui était donc plus possible en vertu de l'article L.1332-4 du code du travail de sanctionner son salarié.
L'employeur l'ayant convoqué à nouveau à un entretien préalable et l'ayant licencié pour faute grave, le salarié avait contesté son licenciement en considérant que le choix de la rupture conventionnelle interdisait à son employeur d'engager, pour les mêmes faits, une procédure disciplinaire.
Nullement selon la Cour de cassation, qui affirme le droit pour l'employeur de reprendre et de mener à son
terme la procédure disciplinaire, dans le respect des dispositions de l'article L 1332-4 du Code du travail.
L'employeur soutient alors devant les différentes juridictions que la prescription est interrompue par tout acte manifestant sans
équivoque la volonté de l'employeur de tirer les conséquences des faits fautifs, et que tel est le cas de la signature d'une rupture conventionnelle.
La Cour de cassation ne le suit pas dans son raisonnement et affirme que " la signature par les parties d'une rupture conventionnelle ne constitue pas un acte interruptif de la prescription prévue par l'article L. 1332-4 du code du travail " (Cass. Soc. 3 mars 2015 n°13-23.348).
En conséquence, en cas de rétractation par le salarié de la rupture conventionnelle, l'employeur qui souhaiterait reprendre la procédure disciplinaire initialement engagée à son encontre, devrait le convoquer une nouvelle fois dans les deux mois suivant la date de convocation au premier entretien.
La procédure afférente à ce deuxième cas de figure peut être visualisée ainsi :
Signature entre les parties d'une rupture conventionnelle :
Rétractation du salarié : dans le délai de
Nouvelle convocation du salarié à un entretien
préalable à son licenciement : Valable si intervient dans le délai de
Entretien préalable : dans le délai de 5 jours ouvrables suivant la remise en main propre ou la présentation de la
Notification du licenciement : dans le délai de 2 jours ouvrables minimum suivant le 2e entretien
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