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Quand un détenu a manqué à ses devoirs ou a commis une faute susceptible d'être sanctionnée, la procédure
disciplinaire est mise en route.
Nous allons voir quelles sont ces fautes, quelles sont les sanctions encourues, quelle est la procédure
mise en place et quels sont les droits des détenus et les recours qui leurs sont ouverts.
Il existe 3 types de fautes classées selon leur degré de gravité.
1) Les fautes du premier degré :
Elles sont énumérées à l'article R. 57-7-1 du code de procédure pénale.
Ce sont les fautes les plus graves, elles concernent principalement les violences physiques commises sur le personnel pénitentiaire, le trafic de stupéfiants au sein de la prison, les dégradations matérielles afin de faciliter par exemple des évasions ou les regroupements violents.
2) Les fautes de second degré
Ce sont des fautes graves également mais qui sont dans la pratique bien plus usuelles que celles du premier degré, c'est le lot quotidien des commissions de discipline.
Ce sont principalement les agressions verbales contre le personnel pénitentiaire, les consommations de stupéfiants ou d'alcool, la détention de téléphone portable, le refus de se soumettre à une fouille ou de sortir de sa cellule etc.
Elles sont énumérées à l'article R. 57-7-2 du code de procédure pénale.
3) Les fautes du troisième degré :
Les moins graves de toutes, elles sont bien sûr sanctionnées la plupart du temps, mais parfois elles sont " tolérées "
par certains établissements pénitentiaires. Cela va dépendre de la politique de chaque établissement ou du département dans lequel la prison est rattachée.
Ce sont des faits tels qu'adresser des courriers injurieux aux autorités administratives, ou à des personnes
extérieures à la prison, le fait de communiquer avec un portable avec des personnes à l'extérieur de la prison, le fait de ne pas faire le ménage dans sa cellule ou de jeter des détritus dans la cour de promenade etc.
Elles sont énumérées à l'article R. 57-7-3 du code de procédure pénale.
Dans tous les cas, les fautes disciplinaires peuvent également faire l'objet de poursuites pénales en plus de la procédure disciplinaire.
Les fautes du premier degré et très souvent du second degré sont systématiquement poursuivies au pénal et
le prévenu sera placé en garde à vue, puis jugé devant un Tribunal Correctionnel.
Sa peine initiale pourra donc être alourdie de quelques mois en plus.
Certains détenus qui ne supportent pas les conditions et les règles de la prison se retrouvent donc à faire des
peines parfois plus lourdes que leurs peines initiales.
J'ai eu des clients qui étaient rentrés pour 6 mois et qui y sont restés finalement 4 ans, pour avoir violé le règlement à répétition.
Les fautes du 3ème degré sont très rarement poursuivies au pénal.
Les sanctions dépendent de la faute commise, une faute du 1er degré ne sera pas sanctionnée comme une faute du 3ème degré.
Les sanctions d'ordre général sont prévues par l'article R57-7-33 du code de procédure pénale :
1° L'avertissement ;
2° L'interdiction de recevoir des subsides de l'extérieur pendant une période maximum de deux mois ;
3° La privation pendant une période maximum de deux mois de la faculté d'effectuer en cantine tout achat autre que celui de
produits d'hygiène, du nécessaire de correspondance et de tabac ;
4° La privation pendant une durée maximum d'un mois de tout appareil acheté ou loué par l'intermédiaire de l'administration ;
5° La privation d'une activité culturelle, sportive ou de loisirs pour une période maximum d'un mois ;
6° Le confinement en cellule individuelle ordinaire assorti, le cas échéant, de la privation de tout appareil acheté ou
loué par l'intermédiaire de l'administration pendant la durée de l'exécution de la sanction ;
7° La mise en cellule disciplinaire. "
En outre, certaines sanctions plus spécifiques peuvent aussi être appliquées en fonction des faits :
Ce sont les sanctions prévues par l'article R57-7-34 du code de procédure pénale :
1° La suspension de la décision de classement dans un emploi ou une formation pour une durée maximum de huit jours lorsque la faute disciplinaire a été commise au cours ou à l'occasion de l'activité considérée ;
2° Le déclassement d'un emploi ou d'une formation lorsque la faute disciplinaire a été commise au cours ou à l'occasion de l'activité considérée ;
3° La suppression de l'accès au parloir sans dispositif de séparation pour une période maximum de quatre mois lorsque la faute a été commise au cours ou à l'occasion d'une visite ;
4° L'exécution d'un travail de nettoyage des locaux pour une durée globale n'excédant pas quarante heures lorsque la faute disciplinaire est en relation avec un manquement aux règles de l'hygiène.
Les sanctions peuvent être assortis du sursis, elles ne seront donc pas effectuées mais elles seront une épée de Damoclès au-dessus de la tête du prévenu en cas de récidive dans les 6 mois.
Il est possible de décider de mettre immédiatement le détenu et ce, avant toute commission de discipline, en cellule disciplinaire ou à l'isolement pour des raisons de sécurité. (le mitard)
En cas de manquement à la discipline, l'agent pénitentiaire qui constate ce manquement rédige un compte rendu d'incident. Il n'est pas susceptible de recours. Le compte rendu est transmis au chef d'établissement qui devra procéder à une enquête. Le chef d'établissement peut aussi classer sans suite dès ce stade de la procédure.
Néanmoins dans l'immense majorité des cas, une enquête sera menée.
Cette enquête a pour but d'établir les circonstances des faits, d'entendre les témoins, d'exploiter les caméras de surveillance etc. Durant l'enquête, le chef d'établissement devra statuer valablement sur l'opportunité de saisir la commission de discipline.
Le chef d'établissement doit statuer dans un délai qui ne peut pas dépasser six mois après la découverte des faits reprochés au détenu. Si le chef d'établissement décide d'engager des poursuites disciplinaires, le détenu est convoqué par écrit. La convocation doit impérativement comporter l'exposé des faits qui lui sont reprochés, leur qualification juridique, est mentionner que le détenu dispose d'un délai pour préparer sa défense, délai qui ne peut être inférieur à 24H.
Le détenu est informé qu'il peut être assisté d'un avocat. L'avocat peut alors se rendre au greffe de la maison d'arrêt et consulter le dossier. Il ne peut le faire avant la convocation et ne peut intervenir pendant l'enquête.
La commission de discipline est présidée par le chef d'établissement ll y a aussi deux assesseurs, d'abord un surveillant qui ne peut pas être l'auteur du compte rendu d'incident ou du rapport d'enquête. L'autre assesseur est une personne extérieure à l'administration pénitentiaire. Ce sont donc des civils et des volontaires.
La commission doit exercer ses fonctions avec intégrité, dignité et impartialité.
Le président donne la lecture des faits. La parole est ensuite au détenu qui présente en personne ses explications. Si le détenu est assisté par un avocat, il est également entendu, toujours en dernier. L'avocat peut présenter des pièces ou des observations écrites s'il le souhaite.
La commission délibère tout de suite et hors de la présence du détenu et de son avocat, qui sont invités à sortir en attendant
le couperet. Les assesseurs n'ont qu'une voix consultative. C'est le président qui se prononce sur la responsabilité du détenu.
La décision de la commission de discipline est immédiatement notifiée par écrit au détenu, ainsi que son droit de former un recours contre cette décision.
Si le détenu souhaite contester la sanction disciplinaire, il doit le faire dans un délai de 15 jours à compter du jour de la notification de la décision.
Ce recours est, avant tout autre recours, une contestation auprès du directeur interrégional des services pénitentiaires.
Ce recours est un préalable obligatoire. Il n'est pas suspensif. La sanction sera appliquée immédiatement, recours ou pas.
Le directeur interrégional dispose d'un délai d'un mois à compter de la réception du recours pour répondre à cette contestation.
Il doit répondre de manière motivée, c'est-à-dire en fait et en droit. Il va effectuer ce qu'on appelle un contrôle de la légalité externe. Il va donc examiner le droit, voir s'il n'y a pas incompétence de la commission, s'il y a des vices de forme. Il va aussi examiner ce qu'on appelle la légalité interne, examiner les faits et l'opportunité et la proportionnalité d'une
sanction.
Ce n'est pas un magistrat, il est aussi un agent de l'administration, il va substituer sa décision à celle prise par la commission.
Si le directeur interrégional ne répond pas durant ce délai d'un mois, cela équivaut à une décision de rejet.
S'il répond de manière explicite par écrit, il peut donc donner droit au détenu et annuler la décision prise en jugeant que la sanction n'était pas adaptée ou qu'il devait y avoir relaxe.
Mais il peut également confirmer la décision de la commission.
Après la décision du directeur interrégional, il est possible de former un recours devant le tribunal administratif.
Le délai pour contester est de deux mois.
La sanction continue néanmoins à produire ses effets. Là encore le recours n'est pas suspensif.
Il est toutefois possible de former un recours en référé suspension pour les cas les plus graves et les plus urgents. ( placement immédiat en cellule disciplinaire)
Ce recours devant le Tribunal Administratif est souvent long et de manière pragmatique, la sanction aura déjà été effectuée depuis longtemps par le détenu.
L'enjeu du recours, sera donc d'effacer cette sanction et de ne pas fermer la porte à des réductions de peines ou à un aménagement.
Car bien évidemment, un détenu condamné par une commission de discipline aura du mal à demander ensuite
une liberté conditionnelle, ou une semi-liberté ou à voir sa peine initiale réduite.
Cela peut donc paraître inutile, mais en réalité, cela est primordial pour l'aménagement de la peine.
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