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Chaque entrepreneur peut malheureusement être un jour victime d'un accident. Cet accident, qu'il se produise dans un cadre professionnel ou privé peut avoir de lourdes conséquences sur l'activité
professionnelle de ce chef d'entreprise, qu'il soit dirigeant de société, artisan, agriculteur, commerçant, ou encore travailleur indépendant.
Mais alors, comment demander réparation, et qui est en droit d'exercer cette action?
La réponse peut sembler simple, pourtant, elle l'est bien moins que ce qu'il n'y paraît.
Il faut tout d'abord rappeler que tout événement entraînant un dommage corporel mérite que l'on s'interroge sur la
possibilité de réparation y étant liée : accident de voiture, chute, agression, accident de sport, de travail...
Dès l'origine, l'assistance d'un avocat peut ainsi être salvatrice.
Quelle qu'en soit l'origine, l'accident donnant lieu à des dommages corporels à nécessairement des répercussions
professionnelles.
Il est ainsi indispensable d'apporter des précisions sur deux points essentiels relatifs au processus d'indemnisation.
(1) Quels sont les préjudices dont on peut solliciter réparation ?
(2) Qui à qualité pour agir ?
La question des postes de préjudices réparables est désormais connue, le socle ayant été posé par Mr DINTHILLAC,
lequel à pris soin de distinguer dans sa nomenclature les postes de préjudices temporaires des postes de préjudices définitifs, ainsi que les postes de préjudices patrimoniaux des postes de préjudices extra-patrimoniaux.
Pour rappel, les postes de préjudices indemnisables sont les suivants :
® Préjudices patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
· Dépenses de santé actuelles
· Frais divers
· Assistance par tierce personne
· Pertes de gains professionnels actuels
® Préjudices extra-patrimoniaux temporaires (avant consolidation)
· Déficit fonctionnel temporaire
· Souffrances endurées
· Préjudice esthétique temporaire
La consolidation fixant de préjudice permanent, c'est à compter de cette date que pourra ensuite être évalué le déficit fonctionnel permanent (éventuel), ainsi que l'ensemble des autres préjudices à caractère permanent, à savoir :
® Préjudices patrimoniaux permanents (après consolidation)
· Dépenses de santé futures
· Frais concernant le logement
· Frais concernant le véhicule
· Assistance par tierce personne
· Perte de gains professionnels futurs
· Incidence professionnelle
· Préjudice de formation
® Préjudices extra-patrimoniaux permanents (après consolidation)
· Déficit fonctionnel permanent
· Préjudice d?agrément
· Préjudice esthétique permanent
· Préjudice sexuel
· Préjudice d?établissement
· Préjudices permanents exceptionnels
Or, la réponse à la seconde question est directement liée au poste de préjudice concerné.
En effet, l'entrepreneur victime d'un accident va ainsi subir des préjudices directement liés à sa personne, d'un
point du vue médical et personnel.
Mais il aura également à subir des conséquences financières directement liées à son absence dans l'entreprise.
On pourrait malgré tout penser qu'il n'existe qu'une seule victime.
Pourtant non.
Deux victimes existent bel et bien, l'entrepreneur personne physique et l'entreprise.
Ici encore, le régime de réparation et les actions à mener dépendent directement de la forme choisie pour exercer son
activité professionnelle.
Les démarches seront différentes selon qu'il s'agit d'un dirigeant ou associé de société (a) ou d'un travailleur
indépendant exerçant à titre individuel (b).
(a) Dans la première hypothèse du dirigeant ou associé d'une société, la société sera considérée comme une victime par ricochet.
On parle de dommage par ricochet, puisque l?entreprise n?est pas la victime directe, mais une victime indirecte,
du fait de l?absence temporaire ou définitive de son dirigeant, de son homme clef.
Ce principe du dommage économique par ricochet personnel et direct de l?entreprise, a été posé de façon claire
notamment par la Cour d?Appel de RENNES, dans une décision du 8 décembre 1995, décision dont la motivation est très intéressante puisqu?il est indiqué :
" la perte de capacité bénéficiaire de l?entreprise due à l?absence d?activité totale ou partielle de son chef, donne lieu à un calcul complexe que seul un expert comptable judiciaire ou amiable est en mesure de réaliser ".
La victime personne physique et la société seront en droit de formuler chacune leurs propres demandes. Ces
demandes étant en conséquence indépendantes bien que liées au même fait générateur.
Naturellement, la société sera représentée par son représentant légal qui aura pour mission d'introduire l'action en réparation, ce représentant n'étant pas nécessairement la victime personne physique elle-même.
Il est ainsi à noter que cette subtilité a son importance.
En effet, un salarié victime d'un accident n'aura pas à s'interroger sur les éventuelles conséquences de son accident sur l'entreprise.
(b) Dans la seconde hypothèse du travailleur indépendant, aucune structure sociétale n'existe.
Pourtant, les répercussions financières peuvent être lourdes.
Or, dans l'hypothèse où l'accident aurait pour conséquence d'entraîner une procédure de redressement/liquidation judiciaire, quid de l'indemnisation et de la qualité pour agir ?
La question est d'importance, dans la mesure où le mandataire désigné représente l'entrepreneur et se
doit d'agir en son nom.
Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la procédure par le mandataire.
Il aura ainsi pour mission d'obtenir réparation des préjudices liés à l'accident, mais ATTENTION, tous les postes de préjudice ne sont pas concernés !
Tel qu'il a été dit, certains préjudices sont directement liés à la personne même de la victime.
Ainsi, les postes de préjudice tel que le déficit fonctionnel temporaire, le déficit fonctionnel permanent, les
souffrances endurées et le préjudice d'agrément sont des postes de préjudices tout à fait personnels, et ne concernent en rien l'activité professionnelle de la victime.
La victime seule conservera la qualité pour solliciter l'indemnisation des postes de préjudices extra-patrimoniaux.
C'est en ce sens qu'a récemment tranché la Chambre commerciale de la Cour de cassation dans un arrêt du 17 avril 2019 (n° de pourvoi 17-18.688), jugeant que :
"Mais attendu qu?ayant constaté que l?action engagée par le liquidateur tendait à obtenir réparation des préjudices résultant du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées, du déficit fonctionnel permanent et du préjudice d?agrément de M. G, la cour d?appel en a déduit à bon droit que seul ce dernier pouvait exercer cette action, attachée à sa personne ; que le moyen n?est pas fondé."
La décision semble d'une logique implacable mais méritait finalement son attendu.
Cette décision confirme ainsi qu'en cas de procédure de redressement ou de liquidation, il appartiendra au mandataire non seulement d'apurer les dettes et de procéder au recouvrement des créances du professionnel, mais également de solliciter réparation au nom et pour le compte de celui-ci des postes de préjudices patrimoniaux liés à l'accident, puisqu'il se trouvera substitué dans ses droits et actions.
Mais cela rappelle et implique également à la victime qu'elle sera contrainte d'engager deux procédure parallèles pour
espérer obtenir réparation intégrale des préjudices liés à son accident.
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