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Les décisions en matière de bail commercial et de covid-19, notamment en ce qui concerne la force majeure et le paiement des loyers échus pendant les périodes de fermeture administratives sont de plus en plus légion. La cour d'appel de Paris, statuant en matière de référés, a rendu une décision le 9 décembre 2020 (20/05041).
En l'espèce, une ordonnance de référé constatait la résiliation d'un bail commercial par le jeu de la clause résolutoire insérée dans celui-ci. Le preneur, en première instance, faisait notamment valoir qu'il n'était pas tenu de régler ses loyers en raison du cas de force majeure (sur le fondement de l'article 1218 du Code civil) que constituait cette pandémie. La période concernée étant celle du confinement allant du 17 mars 2020 au 11 mai 2020.
L'article 1218 du Code civil dispose que :
"Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu'un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l'exécution de son obligation par le débiteur.
Si l'empêchement est temporaire, l'exécution de l'obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l'empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1".
En l'espèce, sur le fondement de cet article, la cour d'appel de Paris retient que les effets de la force majeure sont la suspension et non la réduction de l'obligation ou la résiliation du contrat. Qu'en outre, si elle ne peut être retenue s'agissant des manifestations des "gilets jaunes" qui n'ont eu lieu qu'un jour par semaine et de la grève des transports qui n'entravait pas toute liberté d'aller et venir, la fermeture totale du commerce de la société preneur dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire et du confinement est susceptible de revêtir le caractère de la force majeure.
Sans se prononcer de façon péremptoire, elle ouvre une porte à la possibilité que cette fermeture revête les caractéristiques de la force majeure. Cela lui permet ensuite de dire que cette possibilité, en tant que telle, entraîne l'existence d'une contestation sérieuse quant à l'exigibilité des seuls loyers courant à compter du 11 mars 2020.
Elle renvoie alors les parties devant le juge du fond qui sera, lui, plus apte à juger cette situation.
Cette décision est à recouper de deux décisions au fond rendues par la cour d'appel de Grenoble et le Tribunal de commerce de Lyon.
Par un arrêt du 5 novembre 2020 (16/04533), la cour d'appel de Grenoble avait considéré, pour rejeter la qualification de cas de force majeure, que "concernant le moyen pris de la force majeure liée à l'épidémie Covid 19, il n'est pas justifié par l'intimée de difficultés de trésorerie rendant impossible l'exécution de son obligation de payer les loyers. Cette épidémie n'a pas ainsi de conséquences irrésistibles." Cette décision rappelle une position clairement établie par la Cour de Cassation depuis de nombreuses années, à savoir que le débiteur d'une obligation contractuelle de somme d'argent inexécutée ne peut s'exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure (Cass. com. 16 septembre 2014 n°13-20.306).
Le Tribunal de commerce de Lyon avait rendu une décision similaire le 17 novembre 2020 (2020J00420) en retenant que les trois conditions cumulatives de la force majeur de l'article 1218 du Code Civil ne sont pas réunies. Le preneur ne démontrant pas l'insuffisance de trésorerie qui l'empêcherait de régler son loyer. Etant en outre rappelé qu'un fonds de solidarité et des mesures économiques ont été mises en place. Il appartient alors au preneur de démontrer que bien que les ayant sollicitées, il n'en a pas reçu application, ou que cela n'a pas suffit.
En d'autres termes, la bonne foi contractuelle est au centre des débats.
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