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Fiche pratique rédigée par Maître Pierre DÉAT-PARETI
Maître DÉAT-PARETI

QUELLES DÉMARCHES POUR CONTESTER UN PERMIS DE CONSTRUIRE ?

Urbanisme / Par Maître DÉAT-PARETI, Avocat, Publié le 18/03/2022 à 10h05
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Votre voisin vient de se voir accorder un permis de construire. Vous souhaitez vous opposer à tout ou partie de son projet qui, en l'état, porte manifestement atteinte à vos intérêts. Vous pouvez demander le retrait du permis à la condition de justifier d'un intérêt à agir et que le permis méconnaisse une règle d'urbanisme. Voici comment contester un permis de construire.

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1°) Déterminer si je dispose d'un intérêt à agir contre le permis.

Le requérant ne peut pas se prévaloir de n'importe quel intérêt pour attaquer un permis de construire.

Par exemple, le simple fait d'être un habitant de la commune ne donne pas, en soi, intérêt à contester le permis de construire (CE 8 avr. 1987, no 50755.

Autre exemple, est irrecevable faute d'intérêt à agir le recours d'une société contre un projet en face duquel elle avait loué une toiture-terrasse quelques jours avant la demande de permis. Le requérant a même été condamné à 3 000 euros d'amende dans cette affaire, pour recours abusif (TA Marseille, 5 févr. 2013, no 1300198.)

Pour être recevable à contester un permis de construire, le requérant doit justifier d'un intérêt légitime qui prend la forme d'une atteinte directe aux " conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance " de son propre bien (L600-1-2 du Code de l'urbanisme)

Le requérant devra " préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien " (CE, 13 avril 2016, n° 389798)

Tel est par exemple la cas des " propriétaires d'un bien immobilier situé dans une résidence jouxtant immédiatement la parcelle d'assiette du projet, à laquelle il sera accédé par la même voie que celle menant à l'immeuble qu'ils occupent, et (qui) faisaient valoir qu'ils subiraient nécessairement les conséquences de ce projet, s'agissant de leur vue et de leur cadre de vie, ainsi que les troubles occasionnés tant par les travaux que par l'encombrement des accès de leur bien " (CE, 27 mars 2017, n°399585.)

La question étant régulièrement posée, il est aussi important de retenir que les Syndicats de copropriétaires sont également recevables à contester un permis de construire, notamment lorsque la copropriété est voisine immédiate du projet (CE, 24/02/2021, n°432096).

2°) Identifier les irrégularités du permis susceptibles d'entraîner son retrait ou son annulation.

Un permis de construire ne peut être retiré par le Maire ou annulé par le juge administratif que s'il contrevient à des règles d'urbanisme. Pourquoi ? Parce que le permis de construire est délivré à la lumière de ces règles.

Il existent des règles d'urbanisme d'application nationale et d'autres d'application strictement locale.

Au plan national, ces règles sont inscrites dans le Code de l'urbanisme et par exemple dans le Règlement national d'urbanisme qui figure aux Articles R111-1 à R111-53 de ce code.

Au plan local, on pense surtout au Plan local d'urbanisme élaboré par la commune ou l'intercommunalité (PLU). D'autres règles d'urbanisme locales existent telles que certaines dispositions des règlements sanitaires ayant trait à " l'implantation des constructions, leur destination, leur nature, leur architecture, leurs dimensions, leur assainissement et l'aménagement de leurs abords " [7]. En outre, lorsque le terrain d'assiette du projet se situe à l'intérieur d'un lotissement, le permis de construire doit également respecter les règlement du lotissement [8].

En pratique, les contestataires invoquent tout particulièrement la violation du Code de l'urbanisme ou celles du Plan local d'urbanisme applicable qui donnent lieu à un contentieux nourri.

Le Code de l'urbanisme impose par exemple d'indiquer dans la demande de permis plusieurs information, telles que les identités du demandeur et de l'architecte, la superficie et la localisation du terrain d'assiette du projet ou encore les matériaux et les couleurs qui seront employés pour la réalisation de la construction.

La circonstance que l'une de ces informations ou que l'un de ces documents fasse défaut ne suffit pas à justifier la censure du permis. Faut-il encore que le manquement ait faussé l'appréciation de l'Administration sur la conformité du permis aux règles d'urbanisme.

Au niveau des règles locales, le projet pourra être contesté quand, en particulier, il ne respectera pas les règles de gabarit imposé (hauteur de la construction, forme du couronnement?), quand le projet excèdera la surface d'occupation des sols autorisées, etc.

En revanche, contrairement à une idée répandue le permis de construire ne sanctionne pas le respect des règles de construction, sauf exceptions.

3°) Déposer un recours gracieux devant le Maire.

La faculté de contester un permis devant l'auteur de la décision (le Maire), est ouverte par l'article L411-2 du Code des relations entre le public et l'Administration.

Le recours gracieux doit être notifié au bénéficiaire du permis de construire, et ce à peine d'irrecevabilité de la contestation.

Le recours gracieux n'est pas obligatoire. L'auteur de la contestation peut se pourvoir directement devant le juge administratif.

Néanmoins, l'exercice d'un recours gracieux préalable présente plusieurs avantages :

D'abord, le recours contentieux expose son auteur au paiement des frais d'avocat de la partie adverse sur le fondement de l'article L761-1 du Code de justice administrative.

Il peut également exposer l'auteur du recours contentieux à une amende en application de l'article R741-12 du Code de justice administrative.

Le recours gracieux exclut a priori le risque d'une condamnation de ce type dès lors qu'il n'est pas dans les prérogatives du Maire de pouvoir sanctionner le requérant en lui infligeant amende.

Autre avantage pour l'auteur d'un recours gracieux, le dépôt du recours gracieux proroge le délai de deux mois qui lui est ouvert pour saisir le tribunal administratif.

Le recours gracieux présente à cet égard un intérêt que l'on pourrait qualifier de dilatoire.

C'est d'ailleurs pourquoi il est fréquent qu'en réaction au dépôt d'un recours gracieux, le bénéficiaire du permis entre immédiatement en contact avec l'auteur du recours afin obtenir l'abandon des poursuites dirigées contre son permis (ce qui lui évitera d'avoir à repousser le commencement de ses travaux).

Une indemnité financière ou un aménagement particulier du projet pourront être négociés au profit du requérant.

Sans accord entre les parties et en cas de rejet du recours gracieux, la contestation devra être élevée devant le juge administratif.

4°) Saisir le tribunal administratif en ultime recours.

Le recours contentieux est à présenter devant le tribunal administratif dans le ressort duquel est situé l'immeuble objet du permis de construire.

La procédure ouverte devant la juridiction administrative peut aboutir au rejet du recours, à l'annulation du permis dans son ensemble ou encore à une annulation partielle.

La procédure peut être introduite sans avocat, mais il est hautement recommandé de prendre conseil auprès d'un spécialiste.

Comme le recours gracieux, le recours contentieux doit être notifié au bénéficiaire du permis de construire ainsi qu'à l'auteur de la décision (le maire), et ce également à peine d'irrecevabilité de la contestation.

Enfin, même au stade du recours du contentieux, un accord amiable peut être trouvé avec le pétitionnaire.

Cet accord devra faire l'objet d'un enregistrement au service des impôts. Sans cela, les sommes versées en exécution du protocole pourront donner lieu à restitution.

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