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Le code civil prévoit que les qualités et conditions requises pour se marier sont régies, " pour chacun des époux, par sa loi personnelle ". La loi personnelle est la loi nationale. Il précise toutefois que " deux personnes de même sexe peuvent contracter un mariage lorsque pour au moins l'une d'elles, soit sa loi personnelle, soit la loi de l'État sur le territoire duquel elle a son domicile ou sa résidence le permet " (art. 202-1, alinéa 1 et 2 du code civil). Un étranger dont la loi nationale interdit l'union homosexuelle peut donc se marier en France. Cependant, il ne doit pas relever d'un État lié à la France par une convention bilatérale prévoyant l'application de la loi nationale aux questions relevant du statut personnel. Ces pays sont en Europe : la Pologne, la Bosnie Herzégovine, le Monténégro, la Serbie, le Kosovo, la Slovénie et en Afrique : la Tunisie, l'Algérie et le Maroc. En principe, les ressortissants de ces pays ne peuvent pas se marier en France avec une personne de même sexe, même si la Cour de Cassation a affirmé dans un arrêt de 2015 que le mariage entre personnes de même sexe est une liberté fondamentale à laquelle une convention passée entre la France et le Maroc ne peut faire obstacle si le futur époux marocain a un lien de rattachement avec la France, tel que son domicile (Civ.1ère 28 janv.2015, FS-P+B+R+I, n°13-50.059). Dans les autres cas, il existe un risque que le mariage ne soit pas reconnu par le pays du conjoint (circulaire du 29 mai 2013).
La réponse n'est pas la même selon le pays concerné. Certains pays ont adopté la même politique législative que la France. Aucun problème dans ce cas. Un couple franco-belge marié en France et qui décide de s'installer à Bruxelles ne rencontrera aucune difficulté à faire reconnaître son mariage en Belgique. En revanche, certains États refuseront de reconnaître le moindre effet au mariage entre personnes de même sexe au nom de l'ordre public. Tel sera probablement le cas dans les ays qui condamnent radicalement l'idée même de mariage entre personnes de même sexe et qui, comme la Hongrie, la Pologne ou la Bulgarie, ont inscrit l'hétérosexualité du mariage dans leur Constitution. Il en ira de même des pays qui, comme la Roumanie, ont édicté une règle de conflit rejetant expressément les mariages homosexuels célébrés à l'étranger. Mais le pays étranger qui ne reconnaît pas le mariage aux personnes de même sexe pourra très bien accepter, sous certaines conditions et dans une certaine mesure, une union homosexuelle célébrée à l'étranger, comme le faisait la France lorsque le mariage était conclu à l'étranger entre personnes dont la loi nationale admettait l'union homosexuelle. Dans certains pays qui connaissent un partenariat enregistré similaire au pacte civil de solidarité, comme la Suisse ou l'Autriche, le mariage pourra être requalifié en partenariat : il ne sera pas accepté comme mariage mais on l'assimilera au partenariat et les époux auront les mêmes droits que des partenaires.
Traditionnellement, on admet qu'à l'étranger, le mariage puisse être célébré en la forme locale ou devant les autorités diplomatiques (lorsque des accords diplomatiques le prévoient). Selon l'article 202-2 du Code civil issu de la loi du 17 mai 2013 a repris cette règle : la forme du mariage est régie par la loi de l'Etat sur le territoire duquel il est célébré. Mais lorsqu'un Français ne peut se marier à l'étranger parce que la législation du pays de résidence n'autorise pas le mariage homosexuel et que dans cet État, les autorités françaises ne peuvent procéder à cette célébration, le mariage pourra être célébré en France. La loi du 17 mai 2013 a élargi la compétence territoriale de l'officier d'état civil en matière de mariage : celui-ci peut désormais être célébré dans la commune où l'un des futurs époux a son domicile ou sa résidence, mais aussi dans la commune où l'un de leurs parents (père ou mère) a son domicile ou sa résidence. À défaut, le mariage sera célébré par l'officier d'état civil de la commune de leur choix (article 171-9 du code civil).
Le remariage n'est pas envisageable sous peine de se retrouver en situation de bigamie. Pour pallier cette difficulté, le législateur a prévu que le mariage entre personnes de même sexe contracté avant l'entrée en vigueur de la loi du 17 mai 2013 puisse être reconnu (article 21). Ainsi, les époux mariés avant le 18 mai 2013, dont l'un au moins est français peuvent régulariser leur situation en procédant à la transcription du mariage auprès de l'autorité consulaire ou diplomatique du lieu de célébration. Comme pour n'importe quel mariage célébré à l'étranger, une distinction sera opérée entre les époux et les tiers. Entre les époux, le mariage produit ses effets dès la célébration : par exemple, en cas de décès le conjoint sera considéré comme époux survivant. Vis-à-vis des tiers, le mariage n'est opposable qu'après sa transcription, par exemple pour obtenir des droits sociaux, dans les relations avec l'administration fiscale?
La loi personnelle du défunt détermine si telle personne peut être considérée comme le conjoint survivant, mais la loi successorale décide si le conjoint hérite et suivant quelle quotité. Dans le cas d'un conjoint survivant homosexuel, bon nombre de législations étrangères refuseront de lui accorder des droits. Depuis l'entrée en application du Règlement UE n° 650/2012 du 4 juillet 2012 sur les successions internationales, le critère de rattachement principal est celui de la dernière résidence habituelle du défunt. Ce critère détermine la loi applicable à l'ensemble des opérations successorales et aux droits des bénéficiaires dans la succession, dont ceux du conjoint survivant (article 23 b du règlement). Le règlement admet aussi la professio juris, c'est-à-dire la possibilité pour chacun de choisir sa loi nationale (ou l'une de ses lois nationales) pour régir l'ensemble de sa succession. Cette loi peut être la loi d'un État membre de l'Union européenne ou d'un État tiers.
Si la loi successorale désignée par la règle de conflit de lois ou dans le cadre d'une professio juris est celle d'un pays qui autorise le mariage homosexuel, il n'y aura pas d'obstacle, a priori, à ce que cette loi s'applique. Mais il en va différemment si cette loi est celle d'un État qui ignore ou prohibe sévèrement l'union entre personnes de même sexe. Pour un Français dont le conjoint est turc ou bulgare, il sera impossible de revendiquer son statut marital pour hériter et appréhender des biens dans ces pays. Si un Français marié à une personne de même sexe s'installe dans un pays qui n'admet pas cette union, le notaire pourrait lui conseiller de soumettre sa succession à la loi française comme le permet le règlement UE du 4 juillet 2012. Mais encore faut-il que cette "professio juris" soit admise par la législation de ce pays. Si ce n'est pas le cas, la consultation chez un notaire est dans ce cas impérative pour rechercher une solution.
En France, les règles juridiques relatives au divorce sont les mêmes pour les couples de même sexe et pour les couples de sexe différent. S'agissant de la loi et de la compétence juridictionnelle, la réponse n'est pas la même selon le pays de résidence. Si ce dernier reconnaît l'union entre personnes de même sexe, les époux pourront demander le divorce devant les juridictions compétentes sans difficultés. Mais si le pays ne reconnaît pas leur union, les époux peuvent se retrouver dans une impasse. Des époux, l'un français, l'autre roumain, se marient en France et s'installent à Bucarest. S'ils souhaitent divorcer, les juridictions roumaines sont seules compétentes (en application du règlement Bruxelles II bis). Or comme leur mariage est considéré comme nul en Roumanie, il semble peu probable que le juge accepte de prononcer le divorce. Une solution pourrait être que l'époux français fixe sa résidence habituelle en France avant d'y demander le divorce.
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