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La liberté d'expression est consacrée par les articles 10 et 11 de la Déclaration des droits de l'Homme et du Citoyen de 1789 et l'article 10 de la Convention européenne des droits de l'Homme.
La liberté d'expression est un droit fondamental qui comprend " la liberté d'opinion et la liberté de recevoir ou de communiquer des informations ou des idées sans qu'il puisse y avoir ingérence d'autorité publique et sans considération de frontière. "
Dans le domaine de l'entreprise, il est de principe que tout salarié jouit de sa liberté d'expression dans le cadre de l'exercice de ses fonctions et hors de celles-ci.
Cette liberté n'est toutefois pas sans limite.
La jurisprudence a progressivement dessiné et imposé un équilibre entre l'exercice de la liberté d'expression des salariés et la préservation des intérêts de l'employeur.
Dernièrement, dans un arrêt du 11 décembre 2024, la Haute Cour a précisé le régime juridique entourant l'utilisation des messageries au travail et le secret des correspondances, étant entendu que la frontière entre sphère professionnelle et vie privée est pour le moins tenue.
Contours et limites d'une liberté strictement encadrée.
Tout salarié bénéficie d'une liberté d'expression dans l'entreprise, comme en dehors de celle-ci.
Par principe, les opinions émises par les salariés dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions et en dehors ne peuvent dès lors pas motiver une sanction disciplinaire ou un licenciement.
En effet, le salarié jouit, dans l'entreprise et en dehors de celle-ci, de sa liberté d'expression qui n'est limitée que par la notion d'usage abusif.
Il peut ainsi exprimer des opinions politiques, syndicales ou encore religieuses, sans que l'employeur puisse le sanctionner pour ce motif.
Ce principe s'applique quelle que soit la position hiérarchique du salarié.
Le droit d'expression s'exerce aussi bien dans la vie privée du salarié, mais également sur les lieux et pendant son temps de travail.
Relève notamment de la liberté d'expression du salarié le droit de :
- Contester une sanction disciplinaire qui lui a été notifiée et qu'il considère injustifiée ;
- Porter une critique sur l'entreprise qui l'emploie en présence de ses collègues de travail, sur un lieu privé, hors de la présence de la direction ;
- D'alerter l'inspection du travail sur tout manquement de l'employeur ;
- ...
Toutefois, non seulement l'employeur peut apporter des restrictions à cette liberté dès lors qu'elles sont justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché, mais le droit d'expression peut également être jugé comme étant abusif.
La limite n'est pas évidente à cerner.
Où commence en effet l'abus de langage ? Quelle est l'étendue du pouvoir de l'employeur en la matière ?
Lorsque les propos exprimés par le salarié caractérisent un abus de son droit d'expression, ce dernier peut être sanctionné.
L'abus dans la liberté d'expression du salarié peut notamment être caractérisé par des propos injurieux, diffamatoires, mensongers ou excessifs sur ou à l'égard de l'employeur.
Ont notamment été jugés comme relevant d'un abus du droit d'expression du salarié :
- L'envoi par le salarié à son employeur d'une lettre injurieuse sur son supérieur ;
- Le fait pour un salarié de proférer des accusations mensongères avec l'intention de nuire ;
- ...
Dans la pratique, en cas de litige, les juges du fond devront apprécier les circonstances dans lesquelles les propos du salarié ont été tenus.
Sont notamment pris en compte les fonctions du salarié dans l'entreprise, les personnes destinataires des propos, le contexte et les éventuels antécédents disciplinaires.
Dernièrement, dans un arrêt de décembre 2024, la Cour de Cassation a précisé les contours de l'abus dans la liberté d'expression du salarié.
Ainsi, les messages adressés par un salarié à des collègues en poste ou ayant quitté l'entreprise, contenant des propos critiques et dénigrants à l'égard de ses dirigeants, qui bénéficient d'une présomption de caractère professionnel pour avoir été envoyés au moyen du téléphone mis à sa disposition pour les besoins de son travail et dont le contenu est en rapport avec son activité professionnelle, ne revêtent pas un caractère privé et peuvent être retenus au soutien d'une procédure disciplinaire, peu important que ces échanges ne soient pas destinés à être rendus publics.
Les propos tenus par un salarié dans la sphère privée peuvent donc désormais être retenus à l'aune d'une procédure disciplinaire reposant sur un abus de la liberté d'expression du salarié.
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