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Pour mémoire, la prise d'acte s'analyse comme un mode de rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié en raison des manquements graves qu'il reproche à son employeur mais dont l'appréciation finale reste entre les mains des conseillers prud'homaux.
Ainsi, la prise d'acte emporte les effets soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les manquements reprochés à l'employeur sont justifiés, soit d'une démission dans le cas contraire.
En l'espèce, un salarié prend acte de la rupture de son contrat de travail aux motifs que son employeur :
- n'a pas respecté son droit au repos,
- ne l'a pas informé de ses droits à la formation,
- n'a pas procédé à sa visite médicale d'embauche.
La Cour d'appel décide de faire produire à la rupture du contrat de travail les effets d'une démission, considérant que l'employeur n'avait pas commis de manquement grave.
Saisie à son tour, la Cour de cassation rejette alors le pourvoi formé par le salarié au motif que " la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ".
Cette jurisprudence n'est pas sans rappeler la définition de la faute grave qui est celle " d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise " (V. par exemple : Cass. Soc., 28 avril 2009, n°07-45590).
La prise d'acte du salarié sera donc analysée par les conseillers prud'homaux en considération du degré de gravité du manquement de l'employeur.
Parallèlement à la faute grave, le salarié ne pourra, à l'appui de sa prise d'acte, faire valoir des manquements relativement anciens de l'employeur qui n'ont pas empêché la poursuite du contrat de travail.
La Cour de cassation considère ainsi que : " la prise d'acte permet au salarié de rompre le contrat de travail en cas de manquement suffisamment grave de l'employeur empêchant la poursuite du contrat de travail ; Mais attendu que la cour d'appel, qui a retenu que les manquements de l'employeur étaient pour la plupart anciens, faisant ainsi ressortir qu'ils n'avaient pas empêché la poursuite du contrat de travail, a légalement justifié sa décision ".
Enseignement à tirer de cette solution : le salarié qui tarde à prendre acte de son contrat de travail semble reconnaître par son inertie que le comportement fautif de son employeur ne revêt pas un caractère véritablement grave. Ainsi, l'adage " qui ne dit mot consent " semble trouver application, ce qui est justifié par le bon sens mais non par la coloration générale que le législateur a entendu donner aux dispositions applicables en matière de droit du travail...
Au final, comme en matière de faute grave (côté employeur), la prise d'acte (côté salarié) nécessite une réactivité particulière des parties (et/ou de leurs conseils !).
L'érosion du temps vient donc polir, jusqu'à les faire disparaître, les fautes passées du salarié (ce que l'on savait déjà !) mais aussi de l'employeur (ce qui est nettement plus nouveau !).
Cet arrêt, qui consacre une forme de droit à l'oubli, se situe en rupture avec d'autres solutions rendues naguère par la Cour de cassation.
L'arrêt est donc surprenant, ce d'autant que le salarié invoquait, entre autres manquements, un manquement relatif à l'obligation de sécurité de l'employeur en matière de santé, ce dernier n'ayant pas procédé à la visite médicale d'embauche. N'était donc objectivement pas en cause des obligations revêtant une faible importance. A noter, en outre, la portée importante que ne manquera pas d'avoir cet arrêt puisqu'il a été publié au bulletin.
(Cass. soc., 26 mars 2014, n°12-23634)
MARILYN MAUDET-BENDAHAN. AVOCATE AU BARREAU DE NANTES.
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