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Beaucoup de clients viennent me voir en se demandant ce qu'est concrètement la prestation compensatoire, qui peut y prétendre, quel serait son montant, quand la verser, comment la verser et quel est son régime fiscal ?
Nous allons répondre à ses questions en abordant la prestation compensatoire sous un angle très pratique.
Les justiciables confondent souvent pension alimentaire et prestation compensatoire.
Or, ce n'est pas la même chose.
La pension alimentaire est en réalité ce que l'on appelle, la pension au titre du devoir de secours, c'est une pension versée par un époux à l'autre époux durant la procédure de divorce. Cette pension n'a d'existence que pendant la procédure et disparait après le divorce.
La prestation compensatoire est une somme versée à la fin de la procédure de divorce, elle est versée après le jugement de divorce ou dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel.
La prestation compensatoire est donc une somme d'argent versée à l'autre époux après le divorce, et n'a aucun rapport avec la pension au titre du devoir de secours ou la pension pour les enfants.
Cette prestation peut être prévue dans le cadre d'un divorce amiable, elle est fixée par les époux eux-mêmes avec l'aide de leurs avocats. Aucun juge n'intervient pour la fixer ou la contrôler.
Pour les autres types de divorces, les divorces dits contentieux, c'est le juge aux affaires familiales qui tranchera. Un des époux demandera une prestation d'un montant de X euros, l'autre époux contestera ou proposera un chiffre plus bas, et le juge donnera raison à l'un ou à l'autre ou coupera la poire en deux.
La prestation compensatoire est prévue à l'article 270 du Code civil.
Ce dernier nous indique que :
" Le divorce met fin au devoir de secours entre époux.
L'un des époux peut être tenu de verser à l'autre une prestation destinée à compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives. Cette prestation a un caractère forfaitaire. Elle prend la forme d'un capital dont le montant est fixé par le juge.
Toutefois, le juge peut refuser d'accorder une telle prestation si l'équité le commande, soit en considération des critères prévus à l'article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l'époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture. "
Pour donner un exemple sans doute un peu cliché, mais pédagogique : un homme et une femme mariés depuis plus de 20 ans avec deux enfants, âgés de 50 ans ou plus. La femme a sacrifié sa carrière. Après le divorce, elle aura peu de chance de trouver un emploi ou aura une pension de retraite basse, elle n'a pas de patrimoine propre.
S'il est possible qu'elle garde le logement familial, surtout si la résidence des enfants est fixée chez elle, cela ne signifie pas qu'elle y sera logée gratuitement, et dans tous les cas, il faudra qu'elle pourvoie aux besoins de sa vie quotidienne. Si elle est sans emploi, ou avec un salaire bien moindre que celui de son mari, elle ne pourra plus avoir le même niveau de vie que durant le mariage.
Le divorce va donc créer une disparité entre son ancien et son nouveau niveau de vie.
Cette prestation compensatoire va équilibrer cette disparité. Elle va donc toucher une somme d'argent pour contrebalancer et lui permettre de vivre dans les mêmes conditions après le divorce.
Cela va dépendre bien sûr de plusieurs critères.
La durée du mariage
L'âge et l'état de santé des époux
Leur qualification et leur situation professionnelle
Les conséquences des choix professionnels faits par l'un des époux pendant la vie commune
Le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu'en revenu, après la liquidation du régime matrimonial
Leurs droits existants et prévisibles
Leur situation respective en matière de pensions de retraite.
Concrètement, homme ou femme, chacun des époux peut recevoir une prestation compensatoire.
C'est l'époux le moins " fortuné " qui recevra une prestation compensatoire.
Plus le mariage a duré, plus la prestation sera importante, idem plus les époux sont âges, plus la prestation se justifie. Enfin, le nombre d'enfants, et les droits prévisibles sont particulièrement observés. Ce sont les critères les plus importants.
Mais les juges regardent aussi les circonstances de la rupture, si l'époux lésé a en outre été victime d'une faute de l'autre époux (insultes, violences, adultère etc.) la prestation sera revue souvent à la hausse. C'est ce que nous indique l'article 271 du code civil quand il mentionne l'équité.
La simple différence de revenu n'est donc qu'un critère parmi d'autres.
Il faut donc bien avoir en tête que ce n'est pas, parce que son époux ou son épouse perçoit un salaire plus élevé, qu'une prestation sera versée.
La prestation fait l'objet d'une étude globale.
Si les époux sont d'accord dans le cadre d'un consentement mutuel, ils feront part du chiffre à leur avocat respectif qui leurs indiquera si le chiffre leur semble équitable et proportionné.
L'avocat dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel va les orienter et les aider à déterminer le montant.
S'ils ne sont pas d'accord c'est le juge qui va trancher.
Dans le cadre d'un divorce contentieux, et en cas de demande de prestation compensatoire, les époux devront établir obligatoirement des déclarations sur l'honneur.
Ce sont des déclarations de revenus qui comprenne l'ensemble de leurs actifs au sens large : patrimoine en capital, en revenus, comptes épargnes, actions, obligations, biens immobiliers, héritage, revenus fonciers, assurance vie, allocations chômage etc.
Tout est passé au crible et le juge va regarder quels sont les ressources et les charges de chacun.
Il déterminera dans un premier temps si cette prestation est justifiée ou non, puis en fixera le montant.
Comment ?
Il existe différentes méthodes de calcul pour déterminer le montant :
Sans les détailler dans cet article, il existe globalement 3 méthodes élaborées par des spécialistes. Il y a la méthode du magistrat Dominique Martin-Saint-Léon et celle du notaire-expert Axel Depondt qui globalisent tous les critères de la prestation compensatoire. Ce sont des méthodes mathématiques adoptées par de nombreux juges aux affaires familiales, elles sont objectives et prennent de la distance par rapport à d'autres critères plus humains (tels que les sacrifices, les conditions de rupture ect.) Il existe aussi la méthode de Stéphane David, (Professeur de droit ) plus globale et plus multiple qui conjugue les deux méthodes précédentes.
Evidemment, les différentes juridictions en France ont leurs barèmes et la jurisprudence des tribunaux donnent souvent un ordre d'idées aux avocats ou aux justiciables.
Les montants varient selon que l'on se trouve à Paris, à Bordeaux ou à Lille?
Attention, il est important de préciser que la prestation compensatoire est majoritairement versée sous forme d'argent, mais elle peut aussi prendre la forme d'une attribution d'un bien en propriété, ou d'un droit temporaire d'usage (logement à titre gratuit à l'ancien domicile conjugal pour une période de 2 ans par exemple), ou encore un droit d'usufruit?
NON on ne peut plus demander de prestation compensatoire si elle n'a jamais été demandée pendant la procédure de divorce (divorce contentieux) ou si elle n'a pas été prévue dans la convention de divorce (divorce amiable).
C'est la seule disposition sur laquelle on ne peut pas revenir.
Il faut donc bien réfléchir avant de signer une convention de divorce dans le cadre d'un divorce par consentement mutuel et ne pas oublier de la demander dans le cadre d'un divorce contentieux.
On ne peut pas faire une nouvelle demande au juge après le divorce sur ce fondement.
C'est ce qu'indique clairement toute convention de divorce. Cette mention devant y figurer pour que les justiciables soient prévenus et aient pleinement conscience de cela : " Les époux ont été informés qu'ils ne pourront plus formuler de demande prestation compensatoire après le prononcé du divorce. "
Elle est versée à la fin de la procédure, après le prononcé du jugement.
Le principe est qu'elle est versée en capital, ce qui signifie qu'elle est versée en une fois, concrètement par chèque ou virement bancaire.
- Dans le cadre d'un divorce contentieux, le juge va " condamner " l'un des époux à verser X euros à l'autre époux. Le juge va également indiqué sous quel délai maximum cette somme devra être versée (en général dans les 2 mois, mais cela peut être plus ou moins)
- Dans le cadre d'un divorce amiable : les époux indiquent dans la convention comment et quand elle sera versée à l'autre époux. Ils s'entendent sur les modalités. Le plus généralement, la somme est versée tout de suite après la validation de la convention par le Notaire.
Exceptionnellement, et quand la somme est importante, il est possible de payer la prestation sous forme de mensualités, mais cet échelonnement est limité à une durée maximale de 8 ans.
Le débiteur peut demander la révision de ces modalités de paiement en cas de changement important de sa situation. A titre exceptionnel, le juge peut alors, par décision spéciale et motivée, autoriser le versement du capital sur une durée totale supérieure à huit ans.
Le débiteur peut se libérer à tout moment du solde du capital indexé.
Après la liquidation du régime matrimonial, le créancier de la prestation compensatoire peut saisir le juge d'une demande en paiement du solde du capital indexé. "
L'époux pourra donc, par exemple, être condamné à payer X euros tous les mois pendant 3 ans.
Si l'époux ou l'épouse a des difficultés de trésorerie qui se justifient par un changement de situation (chômage, difficultés de santé etc.) il pourra demander au juge, même après le prononcé du divorce - non pas une révision du montant (comme indiqué précédemment, ce n'est pas possible) - mais une révision des modalités de versement.
Concrètement, si un débiteur qui doit verser la prestation sur une période de 3 ans, il pourra voir cette période s'allonger, et ce, même au-delà de 8 ans, à titre exceptionnel pour réduire les mensualités et lui permettre de payer sur une période plus longue.
Dans le cas d'un paiement en une ou plusieurs fois dans les 12 mois à compter du divorce :
Le débiteur (celui qui paye la prestation compensatoire) bénéficie d'une réduction d'impôt sur le revenu équivalent à 25% du montant de la prestation compensatoire, dont la valeur doit être expressément fixée dans la convention de divorce ou le jugement, et dans la limite d'un plafond de 30 500 ?. Ceci correspond à une réduction maximum de 7 625 ?.
Le créancier (celui qui bénéficie de la prestation compensatoire) n'est quant à lui pas imposé au titre de ses revenus et n'a donc pas à déclarer les versements.
Dans le cas d'un paiement au-delà des 12 mois à compter du divorce : (échelonnement)
Une prestation reçue sur plus de 12 mois devient taxable, selon le régime fiscal des pensions alimentaires.
Pour le débiteur, les versements sont déductibles de son revenu imposable, sans limite de plafond.
Pour le créancier, il est imposable au titre de l'impôt sur les revenus.
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