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Fiche pratique rédigée par Maître BLANDINE HERICHER MAZEL
Maître HERICHER MAZEL

RUPTURE DE CONCUBINAGE ET INDEMNISATION : dommages et intérêts dans des conditions exceptionnelles

Divorce / Par Maître HERICHER MAZEL, Avocat, Publié le 30/06/2014 à 21h19
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Si, en l'absence de tout lien, tant reconnu par la loi, que voulu par les intéressés, le concubinage peut être rompu librement, la responsabilité de l'un des concubins peut toutefois naître d'une rupture abusive dès lors que l'autre est en mesure d'établir l'existence de circonstances particulières qui impriment un caractère fautif au comportement de celui qui a pris cette initiative.

En l'espèce, les relations passées comme l'organisation matérielle mise en place durant la vie commune, alors que l'un et l'autre bénéficiaient de ressources permettant à chacun d'assurer sa subsistance, n'amènent aucun élément permettant de supposer de la part de l'intimé une attitude d'ingratitude, de déloyauté ou une méchanceté propres à caractériser une faute lors de la séparation. La décision attaquée a fait une juste application des principes rappelés et en a tiré leur exacte conséquence

Cour d'appel d'Agen

Audience publique du mardi 13 mai 2003

N° de RG: 01/950

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

DU 13 Mai 2003 ------------------------- C.C/X.../F.B

FAITS ET PROCÉDURE

Marie-José Z... et Guy X... ont vécu maritalement pendant plusieurs années au domicile de ce dernier avant qu'il ne décide de mettre fin à cette relation au mois d'août 1999. Estimant que la sommation qu'il lui a faite le 14 janvier 2000 de libérer les lieux qu'elle continuait d'occuper révélait de la part de Guy X... une ingratitude manifeste et fautive, Marie-José Z... a saisi le Tribunal de Grande Instance de Marmande d'une demande tendant à voire dire qu'en réparation du préjudice né de la rupture brutale de leurs relations elle pourra se maintenir dans ce logement jusqu'au 1er janvier 2001 avant de solliciter la somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts.

Par jugement rendu le 1er juin 2001, le Tribunal de Grande Instance de Marmande l'a déboutée de l'ensemble de ses demandes, dit qu'elle ne bénéficie d'aucun droit ni titre pour demeurer au domicile de Guy X... et l'a condamnée à lui payer la somme de 4 000 francs sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Marie-José Z... a relevé appel de cette décision dont elle poursuit la réformation dans des formes et des délais qui n'apparaissent pas critiquables. Elle expose que durant leur vie commune Guy X... a géré ses biens et ceux de son fils handicapé, dont il percevait d'ailleurs directement la pension, avant qu'il ne rompe brusquement puis lui délivre une sommation de quitter les lieux en compagnie d'un enfant handicapé sans préparer sa réinstallation, ni lui restituer immédiatement l'intégralité des sommes qu'il avait ainsi encaissées pour son compte, la mettant dans le besoin ; elle a de plus quitté le domicile commun le 9 août 2000 sous la pression et les menaces et sollicite de plus fort sa condamnation à lui payer la somme de 100 000 francs à titre de dommages et intérêts.

* * *

Guy X... réplique que tant le fait de se séparer que les circonstances de la rupture ne sont pas fautives, indiquant qu'il avait auparavant sollicité le départ de son amie en raison de son caractère impossible et n'a trouvé d'autre moyen d'officialiser cette demande qu'en ayant recours à un huissier tout en accordant un délai de quatre mois pour ce faire. Il estime avoir durant leur vie maritale participé aux dépenses communes, rappelle que Marie-José Z... étant elle-même propriétaire d'un logement pouvait aisément se reloger et cite nombre de faits postérieurs à son départ démontrant la mauvaise foi de son adversaire. Poursuivant en conséquence la confirmation de la décision dont appel il sollicite la condamnation de l'appelante à lui payer les sommes de 1 525 ä à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et celle de 760 ä sur le fondement de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

MOTIFS

Attendu que si en l'absence de tout lien tant reconnu par la loi que voulu par les intéressés le concubinage peut être rompu librement, la responsabilité de l'un des concubins peut toutefois naître d'une rupture abusive dès lors que l'autre est en mesure d'établir l'existence de circonstances particulières qui impriment un caractère fautif au comportement de celui qui a pris cette initiative ; Qu'au cas précis Marie-José Z... invoque la forme usitée par Guy X... pour l'amener à libérer l'ancien domicile occupé en commun et la situation matérielle et affective délicate dans laquelle elle s'est trouvée à la suite de la rupture en raison notamment de la charge d'un enfant handicapé ;

Mais attendu qu'il découle des explications qu'elle donne de leurs relations à la suite du départ de son ami au mois d'août 1999 que celui-ci, comme il l'indique par ailleurs, était revenu à plusieurs reprises au domicile lui demandant de libérer les lieux ; que dès lors et en l'état de cette information la demande qu'il lui en a faite officiellement le 14 janvier 2001 ne revêt aucun caractère brutal ; Ce d'autant qu'il avait alors spontanément accordé un délai raisonnable pour ce faire qu'il a d'ailleurs accepté de proroger encore quelques semaines, alors qu'elle l'avait sollicité par l'intermédiaire du service social de son employeur au mois de juillet 2000, sous réserve qu'elle cherche effectivement un nouvel appartement ; qu'elle sera ainsi demeurée dans la villa appartenant à Guy X... plus d'un an après leur rupture alors que les éléments qu'elle produit démontrent qu'elle n'a effectué une telle recherche, qui a abouti quelques mois plus tard, qu'à partir du mois de mars 2000 ;

Et que le moyen utilisé n'est pas davantage disproportionné à la situation dés lors qu'il était admissible, qu'ayant échoué au résultat d'une demande amiable réitérée dans les conditions évoquées, Guy X... ait voulu donner à cette démarche un caractère officiel; Attendu de même que les relations passées comme l'organisation

matérielle mise en place durant la vie commune, alors que l'un et l'autre bénéficiaient de ressources permettant à chacun d'assurer sa subsistance, n'amènent aucun élément permettant de supposer de la part de Guy X... une attitude d'ingratitude, de déloyauté ou une méchanceté propres à caractériser une faute lors de la séparation ;

Qu'aucun élément ne permet davantage de considérer qu'il ait voulu contracter une obligation naturelle en vertu d'un devoir de conscience, dont le résultat à suivre l'appelante, devrait conduire à sa condamnation au paiement de la somme réclamée à titre de dommages et intérêts ;

Attendu que la décision dont appel qui a fait une juste application des principes rappelés et en a tiré leur exacte conséquence sera en conséquence confirmée en toutes ses dispositions ; Et qu'à défaut de démontrer que le recours engagé par Marie-José Z... qui a pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits ait procédé d'une intention de lui nuire, Guy X... ne saurait prétendre à la satisfaction de la demande de réparation correspondante ;

Que les dépens étant mis à la charge de l'appelante qui succombe, il convient toutefois de ne pas prononcer à son encontre, tant en équité qu'eu égard à sa situation financière, la condamnation prévue par l'article 700 du Nouveau Code de Procédure civile.

PAR CES MOTIFS LA COUR

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort, Déclare l'appel recevable en la forme,

Confirme le jugement déféré,

Rejette toute autre demande et dit inutiles ou mal fondées celles plus amples ou contraires formées par les parties,

Condamne Marie-José Z... aux dépens, Autorise, conformément aux dispositions de l'article 699 du Nouveau Code de Procédure civile, la SCP TANDONNET, avoué, à recouvrer directement contre la partie condamnée, ceux des dépens d'appel dont elle a fait l'avance sans avoir reçu provision, sans préjudice des règles propres à l'aide juridictionnelle.

Analyse

Titrages et résumés : CONCUBINAGE - Rupture - Dommages-intérêts - Faute - Nécessité - /

Si, en l'absence de tout lien, tant reconnu par la loi, que voulu par les intéressés, le concubinage peut être rompu librement, la responsabilité de l'un des concubins peut toutefois naître d'une rupture abusive dès lors que l'autre est en mesure d'établir l'existence de circonstances particulières qui impriment un caractère fautif au comportement de celui qui a pris cette initiative. En l'espèce, les relations passées comme l'organisation matérielle mise en place durant la vie commune, alors que l'un et l'autre bénéficiaient de ressources per- mettant à chacun d'assurer sa subsistance, n'amènent aucun élément permett- ant de supposer de la part de l'intimé une attitude d'ingratitude, de déloyauté ou une méchanceté propres à caractériser une faute lors de la séparation. La décision attaquée a fait une juste application des principes rappelés et en a tiré leur exacte conséquence

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